Aider Assourita* à guérir et retrouver le sourire.
Comment le renforcement des capacités d’acteurs communautaires par le biais de formation en santé mentale, en conseil et en soutien psychosocial contribue à aider les enfants affectés par la crise au Mali.

- Français
- English
Dans la dynamique et historique ville de Tombouctou, surnommée « la ville aux 333 saints » ou « la perle du désert », la petite Assourita, âgée de cinq ans seulement, pansait ses blessures suite à un accident tragique. Après une longue période de tourments, le processus de guérison commença à s'installer grâce à l'engagement de Mamadou*, un travailleur social de l’ONG Terre des Hommes, un partenaire de l’UNICEF.
L'histoire d’Assourita débute un matin dans la concession familiale, où elle jouait timidement avant que toute sa quiétude soit perturbée : « Elle jouait dans la cour de la maison, quand soudainement un engin explosif est tombé dans la maison, » raconte sa mère, Mariam*, le regard figé sur sa fille. « Au début on ne s’était aperçu de rien, après quelques minutes on a vu qu’elle saignait abondamment. Nous avons donc couru avec elle en toute urgence à l’hôpital. »

Le rire d’Assourita s'était souvent mué en silence depuis cet incident, laissant un vide non seulement dans son cœur mais aussi dans son esprit joyeux. Après quelques jours de traitement, elle a pu être libéré de l’hôpital. Ainsi commençait un long chemin de soins psychosociaux qui étaient nécessaires non seulement pour aider Assourita à retrouver son sourire et sa joie de vivre mais aussi pour ses parents qui devaient faire preuve d’une grande résilience pour l’aider à surmonter cette épreuve qu’un enfant de son âge ne devrait jamais connaitre.
Informée par les services sociaux, l’Administrateur en charge de la Protection de l’Enfant de l’UNICEF a très vite pris contact avec les parents d’Assourita et a facilité le contact avec le partenaire Terre des Hommes. Après un questionnaire minutieux, le travailleur social de l’ONG Terre des Hommes, Mamadou a été désigné pour sa prise en charge du cas de l’enfant. Mamadou lui rendait visite en famille et faisait 2 à 3 appels de suivi, de façon hebdomadaire.
« Quand je venais, je m'agenouillais à côté d’Assourita, lui offrant un cahier et un crayon, l'encourageant à partager ce qui la rendait heureuse, » explique Mamadou, en pleine session avec Assourita. « Au début, ses dessins étaient confus, ce qui reflétait probablement son état d’esprit. Peu à peu, sa créativité se dégageait et son sourire refaisait surface. »
Au Mali, le nombre de psychologues spécialisés est limité. Ces formations offrent aux acteurs formés la possibilité de fournir un soutien inestimable face à un besoin croissant, surtout dans les régions touchées par la crise humanitaire.

L’UNICEF appuie le projet « Investir dans le potentiel : répondre aux besoins de réintégration des adolescents en situation de mobilité, » financé par la République Tchèque, mis en œuvre par le consortium entre L’Organisation Malienne des Psychologues et l’Association Malienne des Travailleurs Sociaux. Ce projet a doté 242 acteurs communautaires locaux et des acteurs de soins non spécialisés, comme Mamadou, de nouvelles compétences en santé mentale et soutien psychosocial (MHPSS), qui permettent de ramener l’espoir aux personnes affectées par la crise dans le pays. Les sessions de renforcement de capacités se sont respectivement déroulées dans les régions de Tombouctou, Sikasso, Gao, Ménaka, Mopti et Douentza. Elles étaient focalisées sur les modules tels que les premiers secours psychologiques ; les étapes du développement de l’enfant ; la prise en charge psychosociale ; les compétences en relation d’aide, la parentalité positive et le soutien entres pairs.
« Au Mali, le nombre de psychologues spécialisés est limité. Ces formations offrent aux acteurs formés la possibilité de fournir un soutien inestimable face à un besoin croissant, surtout dans les régions touchées par la crise humanitaire, » Abdoulaye Maiga, Psychologue, membre de l’Association des Psychologues du Mali. « Aujourd'hui, tous sont engagés sur le terrain et nous poursuivons le suivi avec eux à travers des sessions mensuelles où ils nous exposent des cas, permettant ainsi à chacun de partager des conseils pour améliorer leurs prestations. »
Après ces formations, les acteurs comme Moussa ont offert des services de protection adaptés et sensibles au genre à plus de 8 000 enfants, tels qu’Assourita, ainsi qu'à leurs parents/tuteurs, les aidant à naviguer à travers les multiples situations de traumatisme et dépassant l'objectif de 4 000 enfants du projet. « Les enfants ont appris à exprimer leurs émotions par le biais de l'art, de la musique et de la narration, redécouvrant progressivement leur voix. Chaque séance était comparable à la plantation de graines de résilience, arrosées avec des soins attentionnés, » conclut Moussa.
Pour le psychologue et un des formateurs, Abdoulaye : « ces formations devraient être étendues à d'autres intervenants et devraient intégrer de nouveaux aspects, notamment ceux concernant les acteurs qui accueillent les enfants déplacés en raison des inondations ou des catastrophes naturelles. »

Bien installée dans les bras de sa maman, Assourita se remet doucement et guérit de ses blessures, sous la vigilance de ses parents. Sa maman Mariam, de son côté, témoigne de l'effet positif de l’intervention de Mamadou auprès de sa fille. « Si ma fille n'avait pas bénéficié d'un bon suivi médical et des séances hebdomadaires avec Moussa, elle aurait sûrement développé des séquelles qui auraient pu nuire à sa vie. Je suis convaincue qu’elle grandira sereinement. »
Le Mali est confronté à une crise multidimensionnelle, caractérisée par des attaques contre les civils dans les régions du nord et du centre. Selon le rapport en date du 3 juin 2024 du Secrétaire Général des Nations Unies sur les enfants et les conflits armés dans le monde, 1.232 violations graves contre les enfants ont été signalées au Mali (le rapport couvre la période du 1er janvier au 31 décembre 2023). Le nombre d'événements violents au Mali enregistrés par le projet de localisation et de données sur les conflits armés (ACLED) continue de croître, passant de 1.267 en 2020 à 2.228 en 2023, soit une augmentation de 76% sur une période de quatre ans.
*Noms changés pour protéger l’identité des bénéficiaires et des acteurs.