Une sensibilisation quotidienne pour l’allaitement maternel exclusif et continu
« J’ai caché le biberon, je pensais qu’ils n’allaient pas le découvrir »

Au Centre Mère-Enfant, à Tahoua, de jeunes mères, souvent accompagnées de leur belle-mère ou d’une femme âgée issue de leur famille, patientent dans le hall et dans les chambres partagées. Là, le médecin, les nutritionnistes, les infirmières passent et tentent d’inculquer des notions importantes pour le futur des bébés. Aux murs, des pancartes expliquent les bienfaits de l’allaitement maternel et prônent l’espacement des naissances.
Ce matin-là, le personnel soignant a trouvé, cachée sous un lit, un biberon rempli de liquide noir - décoction traditionnelle que la famille donne au nourrisson hospitalisé pour malnutrition. « J’ai caché le biberon, je pensais qu’ils n’allaient pas le découvrir », dit Fatoumata, la jeune maman, en souriant sans connaître les risques de donner aux nouveau-nés des produits autres que le lait maternel jusqu’à l’âge de six mois. Pourtant, elle vient d’accoucher de son quatrième enfant.
« Bien sûr, on ne se contente pas de confisquer, on sensibilise aussi… », souligne le Docteur Boureima Dourhamane, pédiatre. « Les familles ne connaissent pas les dangers. Les grands-mères donnent souvent cela à leurs petits-enfants, c’est un mélange de feuilles de coton macérées, et de sucre. Souvent, on essaie de convaincre la belle-mère autant que la jeune maman, en parlant des avantages du lait maternel. », explique-t-il. « Les décoctions provoquent des troubles digestifs, tels que des ballonnements, des diarrhées, des infections graves, et de manière générale des problèmes nutritionnels car les enfants, avec le ventre rempli de ces décoctions, prennent moins de tétées…»

Seuls deux bébés de moins de six mois sur 10 reçoivent uniquement du lait maternel au Niger. Pourtant, le lait maternel constitue un aliment sûr, nutritif et accessible pour les nourrissons et les jeunes enfants. Il offre une puissante protection contre les maladies et toutes les formes de malnutrition chez l’enfant, notamment l’émaciation.
Le lait maternel est également le premier vaccin des nourrissons : il les protège des maladies infantiles courantes. Quand la mère le peut, il est donc préférable qu’elle allaite exclusivement. Parmi les petits patients figurent aussi des enfants qui ont perdu leur mère, ou qui ont été abandonnés. Au CRENI de Tahoua, le personnel soignant tente de faire la médiation pour leur trouver une nourrice. Les cas de réadmission concernent essentiellement ces enfants, qui n’ont personne pour leur donner le sein.
Pour lutter contre la malnutrition et favoriser les bonnes pratiques, l’UNICEF Niger mène un travail de sensibilisation, avec l’aide de ses partenaires. L’élaboration de la Politique Nationale de Sécurité Nutritionnelle (PNSN), la mise en place d’un dispositif national de coordination multisectorielle des activités de nutrition sous le leadership du Haut-Commissariat à l’Initiative 3N (les nigériens nourrissent les nigériens), et la mise en œuvre des interventions nutritionnelles à haut impact constituent une illustration des avancées majeures en nutrition au cours de ces dernières années au Niger.

En dépit de ces progrès, la malnutrition continue d’être un problème majeur de santé publique et de développement au Niger. En effet, les données des dernières enquêtes nutritionnelles indiquent que 43,5% des enfants de moins de 5 ans (soit environ deux millions d’enfants) souffrent de retard de croissance avec un taux de 12,7% pour la malnutrition aiguë globale. De même, près de 71,8% des enfants de moins de 5 ans souffrent d’anémie.
« Actuellement, un enfant sur dix admis pour le traitement de la malnutrition aigüe sévère avec complications médicales se trouve dans la tranche d’âge de 0 à 6 mois, ce qui aurait pu être aisément évité par la pratique de l’allaitement maternel exclusif. Ceci montre la nécessité de promouvoir, protéger et soutenir les pratiques optimales d’allaitement pour la réduction de la malnutrition au Niger. », a déclaré Stefano Savi, Représentant de l’UNICEF au Niger.
Au niveau légal, l’UNICEF appuie pour un cadre normatif concernant la commercialisation des substituts de lait maternel, travaille au niveau stratégique pour l’élaboration des documents et supports stratégiques en la matière. Au niveau institutionnel, l’UNICEF appui le renforcement des capacités du personnel soignant pour la prévention de la malnutrition incluant la promotion de l’allaitement maternel exclusif au cours des consultations prénatales, lors de l’accouchement, des consultations post-natales et lors des consultations pour les maladies de l’enfant. Au niveau communautaire et décentralisé, l’UNICEF appuie l’Etat pour la promotion et la sensibilisation et la protection de l’allaitement maternel tant au niveau des centres de santé que le renforcement des capacités et le changement de comportement en faveur de l’allaitement exclusif et continu.

L’initiative régionale « Plus Fort avec le Lait Maternel Uniquement », constitue une réponse concrète à l’élimination de l’eau dans l’alimentation du nourrisson au cours des six premiers mois de sa vie. Dans des pays comme le Niger où l’accès à une eau potable est un défi de tous les jours, beaucoup de familles se retrouvent à utiliser des eaux insalubres, ce qui peut être la source de maladies hydriques souvent mortelles pour les enfants les plus fragiles comme les nouveau-nés. L’initiative appelle à l'intensification des interventions efficaces qui protègent, promeuvent et soutiennent les mères à allaiter exclusivement les nourrissons jusqu’à l’âge de six mois.
Le travail de l’UNICEF en faveur de l’allaitement maternel exclusif est aujourd’hui possible grâce au soutien du Luxembourg, de l’Allemagne, du Fonds thématique, de FCDO, l’Italie, l’Espagne, l’AFD, le BMZ et du Fond Thématique de l’UNICEF pour la nutrition.