Un village de Maradi touché par le changement climatique accède à l'eau potable
Le Niger compte parmi les pays les plus touchés par les conséquences du changement climatique. Dans le petit village de Yarda Sarki, les habitants voient leur situation améliorée depuis l’installation d’une adduction d’eau potable solaire.
C’est un village qui ressemble à tant d’autres au Niger, dans la région de Maradi. Des maisons en torchis, des réserves pour les céréales, tout autour la terre rougeâtre piquée d’épineux poussiéreux. Depuis quelque temps, quelque chose a changé dans le village de Yarda Sarki. L’air semble plus léger, les visages sont moins crispés. Les enfants propres s’installent sur leurs tables-bancs dès que sonne la cloche de l’école. Ils restent jusqu’après le déjeuner : une cantine scolaire a été mise en place, où les repas sont préparés par les femmes du village. Les éleveurs de passage, nombreux sur cette route de transhumance internationale, en témoignent : ils se sentent bien à Yarda Sarki, leur bétail aussi.
Quelque chose a changé dans le village de Yarda Sarki : l’eau est arrivée et elle coule pour tout le monde. Grâce au soutien de ses bailleurs, l’UNICEF a pu installer une mini adduction d’eau potable multi villages, fonctionnant sur énergie solaire, et qui alimente aussi six villages environnants.
« On est presque comme les filles de la ville, maintenant », sourit Aminata, montrant ses mains qui se sont adoucies, depuis qu’elle n’a plus à tirer sur la corde rêche du vieux puits.
Le souvenir des années difficiles est encore bien présent. Tant d’années à partir chercher l’eau dans les hameaux voisins ou, pour les femmes, à se lever en pleine nuit, pour puiser l’eau sous la lumière des étoiles. Des souvenirs de femmes, dans lesquels l’épuisement a pu donner lieu à des drames, comme celui d’une femme tombée dans le puits après s’être endormie. Ou de graves mésententes causées par les longues heures d’attente ensommeillée autour du puits.
De 1984 à 1998 nous n’avions pas d’eau, on allait en chercher dans les villages alentour. Puis on a creusé un puits, ça nous a soulagés. Mais les femmes se disputaient trop, car chacune attendait son tour trop longtemps en pleine nuit.
La voix du vieux Salaou Dan Nari, le chef de village qui, trop âgé, passe le relais à son fils, se fait plus forte quand il évoque le changement que connait le village qu’il a créé. « De 1984 à 1998 nous n’avions pas d’eau, on allait en chercher dans les villages alentours. Puis on a creusé un puits, ça nous a soulagés. Mais les femmes se disputaient trop, car chacune attendait son tour trop longtemps en pleine nuit. »
Depuis la réalisation de la Mini AEP multi-village dans le village de Yarda Sarki, les femmes ont plus de temps et peuvent cuisiner des beignets qu’elles vendent, ont lancé de petits commerces. Certaines sont engagées dans les comités Alimentation du Nourrisson et du Jeune Enfant (ANJE), et préparent des repas pour les enfants pour prévenir la malnutrition.
Les éleveurs nomades peuvent utiliser l’ancien puits pour leurs animaux, en échange de son entretien. Le village s’est organisé, avec des horaires réservés aux éleveurs. « C’est la première condition pour utiliser les puits : que l’on laisse les autochtones passer en priorité. », explique Issoufou Assoumane, un éleveur qui remontera bientôt vers le Nord avec son bétail, pendant deux ou trois mois, pour laisser la place aux cultivateurs.
Eleveurs et cultivateurs échangent sur les temps qui ont changé : certes les puits sont plus nombreux, mais les terres sont plus rares, les pâturages devenus payants, la terre plus pauvre. L’insécurité, aussi, qui oblige les éleveurs à payer d’autres bergers pour éviter les vols de bétail, et les frais liés au prix de l’engrais devenu indispensable pour cultiver les terres toujours plus pauvres. Dans le pays, on estime à 1,3 million de personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable.
C’est la première condition pour utiliser les puits : que l’on laisse les autochtones passer en priorité.
Les anciens se rappellent quand, enfants, ils se baignaient dans les marigots aujourd’hui taris. « On pouvait récolter des milliers de bottes de fourrage que l’on stockait pour toute l’année ! Maintenant ici, c’est devenu le Sahara. »
Regardant les enfants courir sortant de l’école, les femmes qui leur ont préparé le repas dans de grandes marmites, la petite pépinière qui voit les plantes timides sortir de terre, les anciens veulent croire à des jours meilleurs.
Depuis 2019, 70 systèmes multivillages solaires ont été construits au Niger par l’UNICEF pour répondre aux besoins en eau de 327 villages, couvrant environ 400 000 personnes.
Ces systèmes sont conçus pour rester fonctionnels quelque soient les événements climatiques pouvant survenir, pluies intenses ou sécheresses prolongées. Alimentés par l’énergie solaire, ils sont donc résilients aux effets du changement climatique et favorisent également la résilience des communautés aux divers chocs auxquels elles doivent faire face.