A Bagaroua, une école accueille les enfants déplacés et réfugiés
Le parcours d’Oussama et de Youssouf met en lumière les importants défis auxquels est confronté le secteur de l'éducation au Niger, en particulier dans les régions touchées par l’insécurité et les crises humanitaires.

Oussama, 6 ans, est très fier de reprendre l’école. Malgré son jeune âge, le garçon est remarqué pour sa ponctualité et son enthousiasme en classe. « Notre maitresse est très gentille. Elle nous apprend à lire, à compter et à écrire. J’aime le langage, le calcul et l’éducation physique », détaille le garçon. A l’école il retrouve non seulement ses camarades avec qui il a fréquenté le jardin d’enfants (préscolaire), mais il s’est fait aussi de nouveaux amis et se sent à l’aise dans son environnement scolaire.
Parmi les proches camarades d’Oussama se trouve Youssouf. Il a 7 ans et vient de la même localité au Mali. Youssouf est inscrit dans la même classe qu’Oussama. Le rêve d'Oussama de devenir enseignant ou policier, et celui de Youssouf de devenir soldat, font écho aux aspirations d'innombrables enfants confrontés à l’insécurité dans la région.
L'école de Kétaré, avec ses 656 élèves, dont 317 filles, abrite les niveaux primaires, un jardin d’enfants et une classe passerelle. Cette dernière accueille des enfants non scolarisés et déscolarisés, dont la plupart sont des familles déplacées provenant du Mali et des communes environnantes victimes des exactions commises par les groupes armés. Parmi ces familles figurent celles des jeunes Oussama et Youssouf.
Au Niger, le secteur de l'éducation est confronté à des obstacles majeurs, en particulier dans les régions touchées par les crises. L'accès à l'éducation est gravement limité, ce qui expose d'innombrables enfants à toute une série de dangers - de l'exploitation sexuelle et économique à la violence basée sur le genre. Des risques tels que les mariages précoces ou forcés, le recrutement dans des groupes armés, se profilent à l'horizon, assombrissant les perspectives d'une génération.
Les difficultés rencontrées par l'école de Kétaré reflètent le paysage éducatif du Niger. Selon les données disponibles, les crises humanitaires ont un impact considérable sur l'accès à l'éducation, laissant les enfants vulnérables à l'exploitation et à la violence. Les chiffres sont éloquents : selon les données du Cluster Education Niger, à la date du 5 novembre 2023, 941 écoles sont fermées au Niger, affectant 74 395 enfants d’âge scolaire soit 48,38% filles et 1771 enseignants . Le manque d'éducation augmente le risque de mariages précoces ou forcés, de recrutement dans des groupes armés et d'implication dans le crime organisé.
D’importants progrès ont pu être enregistrés cette année au Niger : ainsi, l'éducation demeure une priorité première des autorités en dépit de contraintes accrues sur les revenus du Niger. La continuité éducative a été assurée pour 6 850 enfants dans les zones d’urgence grâce à la mise en place de 137 espaces d’apprentissage temporaires (TLS). Malgré la crise politique ouverte par le coup d’État du 26 juillet, la question de la continuité éducative pour les plus vulnérables est restée sur l’agenda des décideurs publics.

Les besoins restent énormes dans le secteur : en plus des besoins matériels et de la mise en place d’environnements d'apprentissage sécurisés et protecteurs, la formation des enseignants et des membres de la communauté sur les risques liés aux engins explosifs, les questions de genre, le soutien psychosocial, la gestion de l’hygiène menstruelle, et la prévention de la violence basée sur le genre demeurent des investissements essentiels pour permettre la continuité éducative des enfants vulnérables.
A l’école de Kétaré, grâce à la fourniture de matériel de première nécessité, de mobilier, à la formation des enseignants et aux ressources permettant de désengorger les classes, l'école est devenue une lueur d'espoir pour les familles déplacées en quête d'un refuge et d'une vie normale.
« En cette Journée internationale de l'éducation, dont la thématique est cette année « apprendre pour une paix durable », l'histoire d'Oussama et de Youssouf doit servir d'appel à l'action. L'éducation est l'antidote aux incertitudes auxquelles ces enfants sont confrontés quotidiennement. Elle leur apporte non seulement des connaissances, mais aussi un sentiment de normalité et d'espoir », souligne le représentant de l'UNICEF au Niger, Aboubacry Tall. « Notre engagement est de continuer à soutenir des écoles comme celle de Kétaré, en veillant à ce que chaque enfant ait la possibilité de se construire un avenir meilleur. »