Les vaccins sont gratuits - pourtant certains enfants ne les reçoivent pas
Bon nombre des maladies infantiles mortelles au Mali sont tout à fait évitables. Malheureusement, seulement 45 % des enfants au Mali reçoivent tous les vaccins de base.

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« Aboubacar était en bonne santé et se portait très bien », se souvient sa mère, Fatoumata Tounguara. « Et puis, un jour il a subitement commencé à manifester une forte fièvre. J'ai pensé que c'était due à la poussée dentaire. Puis il a commencé à avoir des yeux rouges et une éruption de petits boutons sur tout son corps, et ses autres frères et sœurs ont commencé à manifester les mêmes symptômes. Inquiets, nous les avons tous conduits au centre de santé communautaire. Le médecin nous a confirmé qu'ils souffraient de la rougeole. »
Aboubacar Bah, 9 mois, est l'enfant cadet de Fatoumata et le dernier d'une famille qui comptait déjà six enfants. Fatoumata avoue qu’Aboubacar n'a jamais été vacciné ; aucun de ses frères et sœurs d'ailleurs ne l'a été.
Son cas est loin d'être isolé. Ici dans le village de Sadiola, dans la région de Kayes à l'ouest du Mali, de nombreux enfants issus de familles vulnérables ne sont que partiellement ou pas du tout vaccinés.
Heureusement pour la famille, Aboubacar et ses frères et sœurs ont été immédiatement pris en charge par le centre de santé communautaire de Sadiola et sont à présent rétablis et en bonne santé. Après cet épisode, les enfants ont été tous vaccinés et une campagne de vaccination a été immédiatement lancée dans le village, question de prévenir toute nouvelle propagation.
« Dès qu'un cas de rougeole est confirmé, une réponse est immédiatement enclenchée : le cas est traité et une campagne de vaccination est lancée afin d'éradiquer la menace », explique Adama Traore, agent de vaccination au centre de santé de Sadiola depuis plus de 10 ans.

Malgré le fait que la réduction de la mortalité infantile et maternelle soit une priorité pour le Gouvernement du Mali et ses partenaires, un enfant sur dix meurt encore avant d'avoir atteint ces 5 ans. Bon nombre des maladies infantiles mortelles au Mali sont tout à fait évitables. Malheureusement, seulement 45 % des enfants au Mali reçoivent tous les vaccins de base, tandis que 14 % ne reçoivent aucun vaccin du tout, ce qui constitue une violation de leur droit à la protection contre les maladies infantiles courantes.
« Après avoir été pris en charge pour la rougeole, nos enfants ont tous été vaccinés et, Dieu merci, tous se portent bien à présent »
En matière de taux de couverture vaccinale infantile, la région de Kayes affiche un taux encore plus bas : 41 % seulement des enfants y ont reçu tous leurs vaccins de base. Les difficultés d'accès aux soins pour les familles les plus vulnérables et la faible mobilisation des parents demeurent les principaux obstacles à la vaccination complète de chaque enfant.
Des approches nouvelles et innovantes, telles que les registres numériques pour les enfants vaccinés, et des séances de vaccination supplémentaires dans les lieux de rassemblement comme, les marchés, les écoles, les mosquées et les gares routières, sont mises à profit pour obtenir des résultats, et le la communication et la mobilisation sociale dans le cadre des campagnes de vaccination sont en train d’être renforcées.
L'UNICEF soutient également l'amélioration de la chaîne de froid, à travers l'installation des frigos alimentés à l'énergie solaire, ce qui permet de conserver les vaccins à une température constante. D'ici à 2021, près de 2 000 frigos solaires seront installés sur toute l'étendue du territoire national, y compris à Kayes.

Mais en attendant, les agents de vaccination et les professionnels de la santé ne ménagent aucun effort pour assurer la protection des enfants contre les maladies courantes. A quelques mètres de la famille Aboubacar, une autre famille vient d'arriver au centre de santé communautaire de Sadiola. Leur fille de sept ans, Aissata*, visiblement très affaiblie, a la langue rouge, de petits boutons sur le corps et une fièvre de plus de 39 degrés. Le Directeur Technique du Centre de santé communautaire de Sadiola, le Dr Amadoun Yalcouyé, confirme qu'il s'agit d'un cas typique de rougeole.
« Je n'ai jamais voulu vacciner mes enfants et aujourd'hui je crains de perdre ma fille. Je la vois souffrir et je me dis : « Tout cela à cause d'un vaccin qui est gratuit »
Après avoir diagnostiqué le cas d'Aissata, le Dr Amadoun a décidé de lui administrer immédiatement les soins par voie intraveineuse. Aminata Diallo, sa mère, regrette aujourd'hui de ne pas avoir vacciné ses enfants. « Je n'ai jamais voulu vacciner mes enfants et aujourd'hui je crains de perdre ma fille », s'inquiète t-elle. « Je la vois souffrir et je me dis : « Tout cela à cause d'un vaccin qui est gratuit ».

Après quelques heures d'hospitalisation, la petite Aissata est admise à sortir de l'hôpital et elle peut rentrer chez elle, son état s'étant nettement amélioré.
Ces derniers mois, face aux taux inquiétants de mortalité infantojuvénile ainsi que de mortalité maternelle et néonatale, le Gouvernement du Mali et ses partenaires techniques et financiers se sont engagés dans un processus de réforme du système national de santé. La réforme prévoit la gratuité des soins pour les enfants de moins de cinq ans, facilitant ainsi l'accès aux soins pour les familles les plus vulnérables et isolées.
« Nous amenions nos enfants chez les guérisseurs traditionnels, mais maintenant que les soins sont gratuits, j'emmènerai les miens au centre de santé »
