À Idlib, les écoles rouvrent leurs portes malgré l’incertitude et la peur
Déterminés à regarder vers l’avenir, les enfants reprennent le chemin de l’école

IDLIB (République arabe syrienne), le 19 octobre 2018 – Dans le gouvernorat d’Idlib, au nord-ouest de la Syrie, alors que la violence menace de s’intensifier fortement d’ici peu, plus d’un million d’enfants se réveillent chaque matin sans savoir s’ils seront en sécurité.
Beaucoup d’entre eux sont arrivés ici après avoir fui leur foyer dans d’autres régions de la Syrie. Idlib accueille désormais l’une des plus importantes populations de personnes déplacées du pays. La ville et ses alentours – qui peinaient déjà à fournir des services tels que l’éducation et les soins – atteignent un point de rupture.
« Malgré les conséquences dévastatrices de plusieurs années de conflit sur le secteur éducatif en Syrie, quatre millions de garçons et de filles déterminés ont repris le chemin de l’école dans tout le pays en septembre. »
Pourtant, alors que la nouvelle année scolaire débute, les enfants sont impatients de reprendre leurs études. En situation de crise, l’éducation est vitale pour eux, non seulement parce qu’elle leur permet de continuer à apprendre, mais aussi parce que l’école leur fournit un peu de la stabilité, de la structure et de la protection dont ils ont besoin pour faire face au traumatisme qu’ils ont subi.
Abdullah, Maryam, Ridda et Ulfat sont quatre enfants qui repartent de zéro à Idlib, parfois pour la deuxième ou troisième fois. Voici leurs récits.
Abdullah, 8 ans
« Les bruits de la guerre me font peur. Quand j’entends des explosions, je m’enfuis et je me cache. Avant, je me précipitais dans la maison de nos voisins parce qu’ils avaient une cave dans laquelle on pouvait se cacher. »
« Je viens d’Alep. Il y a des années, quand les combats ont atteint notre ville, nous nous sommes enfuis à Raqqa. Ensuite, les combats ont atteint Raqqa, et nous sommes partis pour Idlib. À Idlib, nous avons beaucoup déménagé avant de nous installer ici, dans le sud de la ville, il y a huit mois. »
« Je veux retourner chez moi, à Alep. C’est ma ville et c’est beaucoup plus beau qu’ici. Mais l’école est bien, ici. »
Maryam, 7 ans
« Je ne sais pas ce que nous ferons si les combats atteignent notre ville. Parfois, mes parents disent que nous devrons peut-être aller en Turquie si cela arrive. »
« Je suis en deuxième année d’école primaire. Je viens du sud d’Idlib. J’aime bien mon école ici parce que j’ai des amis de toute la Syrie qui y étudient. Je vis avec mes parents et mes deux frères. Mon père vend des glaces. »
Ulfat, 9 ans
« Je n’ai plus peur des combats. Mon ancienne ville me manque. À Hama, nous étions mieux installés et l’école était plus agréable. Mais j’aime bien vivre ici maintenant que je me suis fait de nouveaux amis dans cette école. »
« Je suis en deuxième année d’école primaire mais je devrais être en quatrième année. J’ai arrêté l’école quand nous avons dû quitter Hama. Nous sommes allés dans trois villes avant d’arriver ici. Depuis deux ans, nous déménageons sans cesse. »
Ridda, 12 ans
« Je viens de Kafr Batna, dans la Ghouta orientale. Maintenant, j’habite et je vais à l’école dans le sud d’Idlib. Je suis en sixième année de primaire. Il y a environ six mois, nous avons dû quitter la Ghouta orientale pour aller dans le nord de la Syrie. Quatre mois plus tard, nous sommes arrivés dans le sud d’Idlib. Des bus nous ont conduits de la Ghouta orientale vers le nord de la Syrie, et de là, nous nous sommes rendus à Idlib. »
« Je suis parti avec mes parents et ma sœur âgée de 7 ans. Dans la Ghouta orientale, elle a été blessée au cou par un éclat d’obus. J’ai peur de la guerre et des combats. Je ne sais ni ce que nous ferons ni où nous irons si les combats éclatent ici. »
Rétablir l’enseignement à Idlib
Malgré les conséquences dévastatrices de plusieurs années de conflit sur le secteur éducatif en Syrie, quatre millions de garçons et de filles résolus ont repris le chemin de l’école dans tout le pays en septembre. L’UNICEF reste déterminé à fournir une éducation de qualité à ces enfants et aux deux millions d’autres qui sont déscolarisés, d’après les estimations.
Idlib compte environ trois millions d’habitants, et on estime que 2,1 millions d’entre eux ont besoin d’une aide humanitaire. Il y a parmi eux 1,4 million de personnes déplacées, des femmes et des enfants en majorité. Si la violence s’intensifie, ce seront les plus exposés.
« Nous ne cesserons pas d’enseigner. Nous suivrons les élèves partout où ils iront et nous organiserons des activités éducatives là où ils se trouveront. »
De nombreuses écoles manquent de fournitures essentielles, près de 7 000 classes doivent être remises en état, et plus de 2 300 postes d’enseignants sont vacants. En plus d’apporter une aide humanitaire, l’UNICEF agit en faveur de l’éducation dans la ville d’Idlib et ses alentours en fournissant des vêtements et des cartables aux enfants, ainsi qu’en appuyant la formation des enseignants sur le nouveau programme scolaire national et sur le « Programme B » qui permet aux élèves de rattraper les cours qu’ils ont manqués.
À Idlib, les enseignants sont résolus à permettre aux enfants de regarder vers l’avenir. « Si la situation se dégrade, nous prévoyons de déplacer nos activités éducatives vers les zones où se rassemblent les personnes déplacées », précise un spécialiste de l’éducation au sein d’une ONG. « Nous ne cesserons pas d’enseigner. Nous suivrons les élèves partout où ils iront et nous organiserons des activités éducatives là où ils se trouveront. »