La campagne d’identification des enfants sans acte de naissance, une deuxième vie pour les Gabonais
La campagne d’identification de personnes sans acte de naissance a été lancé en mi-novembre dans le Grand Libreville. Elle entre dans le cadre du programme conjoint « Citoyenneté et protection sociale »
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Ils ont tant attendu ce moment…et cela depuis bien longtemps. Amina Izzedine et Mohammed Shawwal sont venus retenter leur chance lors de la campagne d’identification des enfants sans acte de naissance, lancée le 12 janvier 2022 dans le grand Libreville. La deuxieme organisée depuis 2014 par le Ministère des Affaires Sociales avec l’appui de l’UNICEF.
Mohammed Shawwal, 14 ans n’a jamais eu son acte de naissance. Sa maman raconte tout le mal qu’elle a eu pour rattraper le retard d’enregistrement de naissance de son fils depuis 2016.
A cette époque, elle n’avait que 17 ans. “Je me souviens de mes va et vient auprès du tribunal pour rattraper cette erreur. Aussi, il n’était pas facile de réunir tous les témoins mais financièrement aussi, je n’étais pas prête”, se souvient Amina qui a collecté tous les documents requis depuis comme le certificat d’âge apparent comme elle a accouché hors hôpital et les pièces d’identité des témoins.
Elle est confiante que cette fois son fils pourrait avoir son acte de naissance. “Arrivés ici à la bibliothèque municipale du 3ème arrondissement où se déroule la campagne, nous étions bien accueillis et cela a été très rapide et gratuit. J’attends avec impatience la suite de la procédure”, souligne-t-elle en rentrant chez elle en affichant un enthousiasme.
Pour Mohammed, avoir ce papier mettra fin à beaucoup de problèmes aussi. Etant en classe de 3ème cette année, il doit passer son Brevet d’Etude du Premier Cycle (BEPC) mais il espère aussi voyager plus tard et aspire tout simplement à une vie meilleure. “Cela me faisait honte en effet de dire à mes camarades que je n’ai pas de papier légal qui stipule mon existence”, se souvient-il
Comme lui, beaucoup d’enfants ont le même problème. Ils sont en situation d’apatridie et espèrent que cette opération leur offre une deuxième chance. Dans la mairie du 4ème arrondissement, nous avons croisé un groupe de quatre personnes qui s’impatientent dans la salle d’attente.
Ils sont venus pour donner une existence à Divine, une petite fille dont le père a disparu depuis sa venue au monde. “Après la naissance de Divine, le père est parti à la mairie pour faire son acte de naissance. Depuis, il n’est jamais revenu et n’a donné suite à la famille. C’est comme cela que ma nièce n’a jamais eu son certificat de naissance”, raconte Benoît Biaugue, oncle de Divine, qui, lui-même est venu soutenir sa soeur pour cette démarche. Les documents prêts, il espère que Divine, maintenant en classe de 5ème, puisse être reconnue légalement. Il a vu l’annonce sur les réseaux sociaux et n’a pas hésité une seconde pour mobiliser sa sœur à venir demander les informations à leur mairie d’arrondissement.
Cette opération de rattrapage est une aubaine pour les milliers d’apatrides de Libreville. Depuis son début, beaucoup de personnes sont venues pour se renseigner auprès des agents du ministère des Affaires sociales. Ils sont 46 agents recenseurs qui assurent le bon déroulement de la campagne d’identification dans les communes de Libreville, Akanda, Ntoum, Kango et Cocobeatch pendant deux semaines. Ils ont bénéficié de deux jours de formation avant leur déploiement car l’objectif est de ne laisse personne de côté. Enfin, cette opération est totalement prise en charge par l’UNICEF.
Poaty Blanche Edith est superviseur au sein du 3ème arrondissement. Ce jour-là, elle ne s’est pas accordée de pause-déjeuner car beaucoup de gens sont venus soit pour se renseigner soit pour déposer les dossiers. “Nous avons vu beaucoup d’engouement de la part de la population. J’ai vu plusieurs parents avec différents cas, venus déposer le dossier de demande de l’acte de naissance de leurs enfants qui n’ont pu être déclarées à la naissance à cause de différents facteurs : manque de moyens, départ des pères ou non reconnaissance de ces derniers”, explique-t-elle.
Les autorités soutiennent aussi cette campagne. “Je salue personnellement cette initiative très louable, salvatrice et salutaire car elle peut sauver beaucoup de familles. La finalité est surtout d’avoir accès à la protection sociale mais surtout de donner une chance à l’enfant d’être un citoyen légal”, assène Monsieur Obame Emane Jean Baptiste, Maire du 1er arrondissement de Libreville. Ce jour-là, sa mairie a accueilli 150 personnes dont la plupart sont venus pour se renseigner.
Cette campagne d’identification de personnes sans acte de naissance entre dans le cadre du programme conjoint « Citoyenneté et protection sociale ». Lancé en mi-novembre dans le grand Libreville par le Ministere des affaires sociales et des droits de la femme en collaboration avec UNICEF, elle touchera plus de 30 000 enfants supplémentaires en situation d’apatridie. La première phase du projet a pu fournir des actes de naissances et de cartes d’assurance maladies à 11780 enfants vulnérables dans différentes municipalités de la province de l’Estuaire.