Des enfants syriens contraints de quitter l’école, voire de se marier pour survivre

Découvrez l’histoire de Jomaa et Hadya, deux amis d’enfance qui vivent désormais une vie d’adulte.

Par Hedinn Halldorsson
Jomaa, 14 ans, ne va plus à l’école car il doit soutenir sa famille financièrement
UNICEF Video
23 janvier 2017

Au Liban, de nombreux enfants syriens réfugiés sont brutalement sortis de l’enfance. Certains sont obligés de travailler pour garantir un revenu stable à leur famille tandis que d’autres sont forcés de se marier prématurément pour leur propre protection et pour des raisons financières.

BEYROUTH, Liban, le 23 janvier 2017 – Il y a quatre ans de cela, quand ils avaient 10 ans, Jomaa et Hadya étaient de très bons amis qui vivaient une enfance heureuse. Ils jouaient au football après l’école et faisaient leurs devoirs ensemble.

Aujourd’hui, aucun des deux ne va plus à l’école. Jomaa ne sait plus ni lire ni écrire et Hadya a été mariée. Les deux enfants ont les devoirs et les obligations d’un adulte.

Hadya n’a jamais quitté sa ville de Syrie. Ses parents l’ont mariée au grand frère de Jomaa. Jomaa, lui, gagne sa vie au Liban où sa famille a trouvé refuge, lui garantissant un revenu stable. Il est payé 2 dollars pour une journée de travail de douze heures. 

« Toute la Syrie a été dévastée. Mon école a été bombardée mais mes anciens camarades de classe continuent d’y aller. Hadya et moi étions dans la même classe. Puis la guerre a éclaté et j’ai tout oublié. Comment lire, comment écrire », raconte Jomaa.  

L’extrême pauvreté à laquelle nombre de réfugiés syriens sont confrontés leur impose de prendre des décisions qu’aucun parent ne devrait jamais avoir à prendre. Parmi ce que l’on appelle les stratégies d’adaptation négatives, conséquences de ces épreuves, on trouve le mariage et le travail des enfants. L’éducation est la clé pour lutter contre ces deux pratiques.

« Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour permettre aux enfants syriens de fréquenter l’école. Dans un premier temps, cela consiste à aider les familles financièrement afin qu’elles puissent investir dans l’avenir de leurs enfants au lieu de se préoccuper de la façon dont elles vont pouvoir les nourrir », explique Tanya Chapuisat, Représentante de l’UNICEF au Liban.

 « Les étapes secondaires consistent à payer les frais de scolarité, à organiser un roulement à l’école, à fournir du matériel pédagogique et à proposer un programme pour les enfants ayant été déscolarisés pendant des années. »

Hanadi, 13 ans, une adolescente syrienne maintenant refugiée au Liban
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Hanadi, 13 ans, une adolescente syrienne maintenant refugiée au Liban. Deux de ses sœurs ont été mariées avant de pouvoir finir leurs études. Elle souhaite avoir un avenir différent
Des mesures désespérées

« Les parents syriens sont parfaitement conscients de l’importance de l’éducation pour l’avenir de leurs enfants ; avant la guerre, le taux de scolarisation en Syrie dépassait 90 %. Mais leur situation est telle que bien souvent ils n’ont pas d’autre choix que d’envoyer leurs enfants dans la rue ou les champs pour générer un revenu, ce qui explique le taux de fréquentation scolaire d’environ 50 % seulement aujourd’hui », poursuit Madame Chapuisat.

Le même désespoir pousse les parents à marier leurs filles.

Hanadi, jeune adolescente syrienne de treize ans réfugiée au Liban, a pu observer les conséquences du mariage précoce et s’inquiète de son propre avenir.

« Les filles qui sont mariées jeunes n’ont pas le temps de vivre et ne reçoivent pas d’éducation. Elles ne savent rien. J’ai deux sœurs qui ont toutes les deux été mariées jeunes. Je ne veux pas qu’il m’arrive la même chose. »

La principale raison du mariage des enfants dans le contexte des réfugiés syriens est le fait pour les parents d’avoir une bouche en moins à nourrir tout en espérant leurs filles en sécurité et à l’abri du besoin. Marier sa fille peut aussi être vu comme une mesure de protection au regard de la vulnérabilité des jeunes filles et du risque de harcèlement sexuel auquel elles sont exposées dans les camps informels au Liban.

« C’est tout simplement une question de survie et il y a lieu de s’inquiéter car la situation socioéconomique des réfugiés syriens dans le pays se dégrade », ajoute Madame Chapuisat.

L’un des principaux moyens pour lutter contre le mariage des enfants est d’informer les parents et leurs filles des risques et des conséquences. On note que le refus du mariage est sensiblement plus élevé chez les jeunes filles scolarisées. Là encore, l’éducation et la sensibilisation sont essentielles.

« Dans ce domaine, rien n’est simple mais cela est faisable », conclut Madame Chapuisat.

Pour visionner l’entretien avec Jomaa et découvrir ce qui l’empêche, comme d’autres enfants syriens réfugiés au Liban, d’aller à l’école ainsi que l’action de l’UNICEF pour y remédier, rendez-vous sur http://www.imagineaschool.com/