Des distributions de cash pour soutenir les ménages les plus vulnérables
A Maradi, les populations rurales souffrent à la fois des conséquences de la sécheresse, et des inondations. Une extension du programme pilote de transferts monétaires en réponse aux chocs climatiques vise à répondre aux besoins immédiats des populations

Une foule sage et organisée patiente sous les grands arbres. D’un côté, les hommes. En face, des femmes, et de jeunes enfants. Sous le hangar en tôle, enfin, des bénéficiaires. Elles sont 65 précisément, et tiennent en main une fiche cartonnée portant nom, prénom, photo… Ces femmes du village de Guidan Jibbi, dans la commune de Chadakori, attendent la distribution de la première tranche de cash « sécheresse ». En ce mois d’août, la période de la sécheresse a laissé la place depuis plusieurs semaines à celle des inondations, des cultures dans les champs de sorgho et de mil. Cette période de soudure est particulièrement difficile, car les réserves sont depuis longtemps épuisées, et les semences n’ont encore rien à donner. Tout est vert aux alentours et on espère une meilleure saison que celle qui a précédé, dont les maigres récoltes ont tant affamé les ménages du petit village.
Un système d’alerte précoce détermine les villages les plus affectés par la sécheresse au niveau national. Les ménages ont été identifiés selon leur degré de vulnérabilité avec l’appui du cabinet Base-DC recruté par le Projet Filets Sociaux Adaptatifs II pour réaliser le ciblage des ménages. Les femmes ont été choisies pour recevoir l’allocation financière afin de favoriser une meilleure utilisation au profit de tous les membres de la famille, en particulier les enfants. Chacune va recevoir au nom du ménage ciblé 4 tranches de 45000 CFA distribuée chaque trimestre pour les aider à supporter les difficultés liées à la sécheresse qui a frappé leurs champs la saison passée.
« C’est depuis les 5 dernières années que c’est devenu très difficile », témoigne Amina Ahmed, qui pense avoir plus de 60 ans, a élevé 8 enfants – sa coépouse en a 8 également. « Ces 3 dernières années cela s’est aggravé, les animaux sont tombés à cause de la sécheresse. Cette année nous n’avons pas semé de haricots, nous n’avons pas trouvé l’argent pour l’achat des semences. Au marché, on achète des mesures, jamais des sacs. »
L’angoisse est encore latente : les villageois ont parfois dû renoncer à planter leurs propres champs pour aller cultiver ceux de plus grands exploitants, afin de gagner un peu d’argent. Cette année, il est arrivé aux villageois de manger les feuilles des arbustes alentours pour se remplir le ventre, après avoir vendu les petits ruminants et les volailles. Mais l’espoir renaît : ainsi une dame âgée avait envoyé un garçon vendre son coq au marché. Quand elle a su que la distribution aurait finalement cours dans la journée, la vieille femme l’a fait rappeler, provoquant les sourires de l’assemblée.
Amina tient ses 45 000 Francs CFA dans sa main. Pour elle, pas question de mettre de côté, d’investir ou de se lancer dans une nouvelle activité : « je vais acheter à manger ! Acheter des vêtements, à quoi bon quand on a si faim ? Ma première intention, c’est de manger. Nous les mères, avons tellement souffert de la faim ! Nos enfants, quant à eux, leur souffrance est encore plus grande. »
Soueba, à 18 ans, est la cadette des femmes bénéficiaires de la distribution. Elle élève 4 enfants dans une partie de sa maison – l’autre partie s’est écroulée lors des récentes inondations. « Les années passées, la vie allait en dents de scie. Mais la sécheresse de la saison passée a été une catastrophe. Combien de fois suis-je rentrée à la maison les mains vides, trouvant les enfants couchés, sans rien pouvoir leur donner ? » Souriante, la jeune femme trouve des raisons d’espérer : « cette année, tout ce que nous avons planté est en train de verdoyer. »
Pour Stefano Savi, Représentant de l’UNICEF au Niger, « ce projet est un bel exemple de travail commun entre agences, puisque nous nous sommes réparti les zones de distribution avec la Banque Mondiale et le Programme Alimentaire Mondial. Dans le souci de créer une synergie d’action et produire un meilleur impact, l’UNICEF et le PAM se mobilisent pour accompagner les efforts du Gouvernement pour les interventions de transferts monétaires et de prévention de la malnutrition. »
Au total, 45 150 personnes (6 450 ménages) vont bénéficier de ces distributions dans 78 villages des communes de Dan-Goulbi et de Chadakori dans la région de Maradi avec l’appui technique et financier de l’UNICEF.