Substituer des motocyclettes par des ânes pour administrer des vaccins vitaux au centre du Mali
Au milieu d'une insécurité grandissante, les agents de santé font le nécessaire pour vacciner des enfants
Mopti,Mali – Mamadou, 29 ans, voyage pendant des heures à bord d'une charrette tirée par un âne sous le soleil brûlant du midi. Sur ses genoux, il porte une boîte isotherme. Après l'avoir chargée de vaccins vitaux, il s'engage sur un chemin sablonneux pour rencontrer Aissata et sa fillette de 3 mois, Mariam, dans le petit village de Kankelena.
L’insécurité grandissante dans la région de Mopti, au centre du Mali, rend la situation difficile pour des mères comme Aissata de maintenir leurs enfants en bonne santé. Le centre de santé le plus proche est souvent très loin et le chemin pour s’y rendre dangereux. En plus, le transport est trop coûteux pour la plupart.
«Je rencontre d'énormes difficultés pour me rendre au centre de santé» affirme Aissata. «Au-delà de la distance et de l'état dégradant du chemin pour y arriver, il y a l'insécurité. Nous désirons emmener nos enfants au centre de santé mais, à cause de l'insécurité, nous avons peur».
En plus, les moyens de transport sont moins nombreux qu'ils ne l'étaient avant. Pour des raisons de sécurité, les motocyclettes ont été interdites de circuler entre les villes (des groupes activistes sont connus pour leur utilisation).
Par conséquent, les agents de santé comme Mamadou ont substitué les motocyclettes par des ânes pour administrer des vaccins vitaux. D'autres ont recours à des charrettes tirées par des chevaux ou, lorsque l'eau devient un obstacle, à des pirogues.
« Les conditions de vie ici sont vraiment difficiles à cause de l'insécurité grandissante. Les femmes et les enfants sont ceux qui en souffrent le plus. C'est ce qui m'a motivé à faire ce que je fais. »
Un effort supplémentaire peut sauver la vie d'un enfant
Aissata a perdu son premier enfant des suites d'une maladie non diagnostiquée. Malheureusement, elle n'est pas la seule. Dans son village, plusieurs autres parents ont vécu la même tragédie. Mais, de façon encore plus tragique, certains parents ont perdu leurs enfants des suites de maladie totalement évitables, comme la rougeole.
« Nous avons eu une épidémie de rougeole dans notre district de santé il y a de cela un mois », raconte Mamadou. Le troisième enfant d'Aissata comptait parmi les enfants infectés. « Il avait des boutons sur tout son corps ainsi que sur son visage. Il avait une fièvre et était très malade. Il a failli mourir » explique-t-elle. « J'avais très peur... Depuis ce jour, je m'assure que tous mes enfants soient vaccinés ».
Mopti est parmi les régions du Mali ayant un des taux les plus bas d'enfants complètement vaccinés : seulement 37% le sont. Et depuis que l'état sécuritaire dans la région s'est détérioré, le nombre d'enfants non vaccinés a quadruplé, dépassant les 70.000 enfants. L'accès étant le plus grand problème, apporter les soins de santé le plus proche possible des maisons de ces enfants est une solution pratique.
Voir Mamadou venir directement dans sa maison change tout pour Aissata. « Cette vaccination de porte-à-porte est une bonne initiative. L’agents de vaccination vient chez nous - nous n'avons pas besoin de mettre les vies de nos enfants et les nôtres en danger ».
Une fois la petite Mariam et les autres petits enfants vaccinés contre la rougeole, Mamadou plie sa boîte de vaccination et se prépare à rentrer. Il a conscience qu'il devrait encore arriver chez lui avant que le soleil ne se couche. En disant au revoir, il rassure les mamans du village Kankelena qu’il reviendra le mois prochain.
La forte détérioration de la situation humanitaire dans la région centrale de Mopti au Mali affecte de plus en plus les enfants les plus vulnérables. UNICEF collabore étroitement avec le Ministère de la Santé et des Affaires Sociales, Gavi (l'Alliance de vaccination) et l'Organisation Mondiale de la Santé afin d'administrer des vaccins vitaux contre la polio, la rougeole et le tétanos aux enfants et aux femmes. L’UNICEF et ses partenaires ciblent 11 districts ayant le plus grand nombre d'enfants non vaccinés, y compris la région de Kayes. En 2018, UNICEF a collaboré avec ses partenaires pour l'administration du vaccin contre la rougeole à plus de 700.000 enfants au Mali.