Des bancs scolaires vides au Mali
Au niveau national, plus d'un million d'enfants sont déscolarisés
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Au niveau national, plus d'un million d'enfants sont déscolarisés. Dans la région de Kayes, riche en or mais frappée par la pauvreté, la situation se détériore davantage, l'éducation prenant le pas sur la promesse de la richesse. Pour s'attaquer à ce problème, l'UNICEF au Mali et ses partenaires mettent en place des espaces d'apprentissage pour les enfants déscolarisés et distribuent des kits scolaires pour alléger le fardeau financier des parents. Mais la question est complexe et nécessite beaucoup plus de soutien.
Au fin fond de la région de Kayes au Mali, à plus de deux jours de route de la capitale, la plupart des parents sont des agriculteurs et orpailleurs dont la principale préoccupation est de joindre les deux bouts dans une région où tous les prix ont flambé du fait de la présence de l'or.
Sadio Diarra ne connaît pas son âge exact. Mais sait qu’elle est allée à l'école pour une année seulement. Son histoire n'est pas inhabituelle. Le directeur de l'école de Kossaya estime que pour chaque tranche de 40 enfants qui commencent la première année du primaire, seulement 10 d'entre eux atteignent la sixième année.
Seulement trente mètres séparent la salle de classe de première année à Kossaya de celle de sixième année. Mais trois enfants sur quatre n'arrivent jamais jusqu'au bout du couloir.
Aujourd'hui, Sadio passe ses journées loin de son ancienne salle de classe. Elle se lève à l'aube pour balayer la cabane ronde dans laquelle elle vit avec sa famille. Parfois, dit-elle, sa petite sœur l'aide.
Une autre tâches principale de Sadio est d'aller chercher de l’eau - une tâche souvent réservée aux femmes et aux enfants. Sadio a la chance d'avoir une pompe à eau dans son village : encore aujourd'hui, seulement 50% des Maliens ont accès à l'eau potable.
A la pompe à eau du village, le soleil commence à être ardent et Sadio attend son tour pour remplir son seau. Les températures peuvent atteindre 45 degrés dans la région de Kayes.
Sadio est la cuisinière principale de la famille. Avec un total de quatorze enfants dans le ménage de sa famille élargie, la préparation des repas n'est pas tâche facile. Sadio verse du maïs dans un grand mortier.
Piler du maïs est une tâche physiquement exigeante, comme la plupart des tâches que Sadio doit performer. Elle admet qu'elle se fatigue de tout ce travail et qu'elle aimerait pouvoir dormir davantage.
Avec une famille aussi nombreuse, la lessive peut parfois prendre une bonne partie de la journée. Sadio lave une partie des vêtements de son petit frère dans la cour à l'extérieur de la hutte familiale.
D'autres femmes et filles sont dans la même cour et accomplissent des tâches similaires. Avec l'aide d'une aînée, un groupe de filles âgées de deux à trois ans apprennent par elles-mêmes à cuisiner à l'aide de petits bols.
Sadio a commencé à travailler dans les sites d’orpaillage il y a de cela trois ans. Sa mère lui a montré comment tamiser l'or. Quand c'est la saison des mines, elle se dirige vers les sites d’orpaillages avec d'autres enfants de son âge et sa calebasse sur la tête.
Il faut environ une heure pour s'y rendre à pied. « C'est un dure labeur » dit-elle. « La charge est lourde. »
Les jours où elle ne va pas au site d’orpaillage, Sadio tient un petit stand pour vendre de l'essence aux villageois qui possèdent des motos. L’essence est stockée dans de simples bouteilles en verre.
Le père de Sadio, Alamouta, n'est jamais allé à l'école lui-même et ne sait pas lire, bien qu'il ait appris quelques mots de français de ses amis.
« Je sais que l'éducation est importante, » dit-il.
« Mais l'éducation coûte très cher. Si nous devons acheter des stylos, des cahiers et payer des cotisations pour les salaires des enseignants, c'est trop cher. »
Les vêtements traditionnels d'Alamouta montrent son statut de chasseur. À l'aube, il chasse les antilopes, les lapins et les porcs épics ; plus tard dans la journée, il cultive le mil, le sorgho et les arachides.
Les jours d'école de Sadio étaient si courts qu'elle s'en souvient à peine aujourd'hui. Pendant sa journée de travail, elle porte une amulette en tout temps pour se protéger. Mais la signification exacte du cadeau de son père, dit-elle, est un secret qu'elle ne peut révéler.