« Si les vaccins n’existaient pas il aurait fallu en inventer ! »
Introduction de la deuxième dose du VAR : un chemin pour l’élimination de la rougeole au Mali.

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Youssouf Diarra habite à Diamarabougou, un village situé dans le district sanitaire de Markala, dans la région centrale de Ségou. Cela fait plus de 20 ans qu’il exerce le métier de vaccinateur dans le centre de santé communautaire.
« Durant mes premières années d’exercice, le métier était très difficile car les villageois avaient peur des effets secondaires et ne faisaient pas confiance aux vaccins. Aujourd’hui, vingt ans plus tard, je peux vous dire que non seulement les choses ont changé mais ce sont les parents mêmes qui viennent me demander le calendrier de vaccination pour être surs que leurs enfants soient vaccinés, » relate Youssouf avant de commencer sa tournée.
Depuis l’introduction de la deuxième dose du vaccin contre la rougeole (VAR2) en fin 2019, dans le Programme Élargi de Vaccination du Mali, Youssouf s’assure à chaque passage dans les familles que les enfants de 15 à 23 mois ont reçu leur deuxième dose de VAR. Cette deuxième dose du vaccin a été introduite pour booster l’immunité de l’enfant et donner une deuxième chance à l’enfant d’être davantage protégé contre la rougeole.

Durant sa tournée, il fait un arrêt chez la famille de la petite Aminata Farota, 4 ans. Elle a bénéficié d’une dose supplémentaire de VAR lors de la riposte vaccinale à l’épidémie de rougeole survenue dans son district sanitaire, Markala, juste avant l’introduction du VAR2 dans le Programme Elargi de Vaccination (PEV) de routine. Malgré une première dose de VAR reçue avant son premier anniversaire, Aminata a développé la rougeole. « Un jour, elle commençait à avoir le corps chaud, ensuite des boutons ont envahi son visage, elle mangeait moins et perdait du poids tout comme trois autres de ses frères » raconte Boubacar, le papa d’Aminata. « Quand le vaccinateur Youssouf est venu, il nous a tout de suite demandé de les emmener au Centre de Santé Communautaire. Après les analyses, le médecin nous a dit qu’ils avaient la rougeole. Le lendemain Youssouf avec son équipe commença une vaccination de tous les enfants du quartier et Aminata et ses autres frères de la famille ont été vaccinés, » conclue le pécheur de Diamarabougou aujourd’hui confiant de voir sa fille Aminata en parfaite santé.
Pour Youssouf, cela ne fait l’ombre d’un doute, les vaccins sont sûrs, efficaces et sauvent des vies. « L’introduction de la deuxième dose de VAR dans le PEV de routine, est vraiment une nécessité, elle donne une deuxième chance à l’enfant d’être protégé contre la rougeole », insiste-t-il.
« Si ces vaccins n’existaient pas il aurait fallu en inventer. En plus de protéger nos enfants contre les maladies, ils sont gratuits. Nos parents, n’ont pas eu cette chance, alors profitons et vaccinons nos enfants »

Partout dans le monde, les systèmes de santé sont mis à rude épreuve et, plus cette pandémie durera, plus elle perturbera le fonctionnement des services de santé essentiels comme la vaccination. Dans un pays comme le Mali, affecté par une crise humanitaire et sécuritaire, qui cause le déplacement de plus de 300 000 personnes dont plus de 50% sont des enfants, la COVID-19 a davantage fragilisé une situation déjà complexe. Malgré, la pandémie de COVID-19 qui a ralenti la distribution de vaccins contre des maladies mortelles et hautement contagieuses comme la rougeole et la poliomyélite, au Mali, l’UNICEF en appui au Gouvernement ne ménage aucun effort pour assurer la continuité des services essentiels comme la vaccination.
« Avant l’introduction du VAR 2, en 2019, dans le district sanitaire de Markala, 9 cas de rougeole avaient été confirmés malgré les campagnes de vaccination que nous menons. Certains enfants avaient même déjà reçu leur première dose de VAR, » nous explique Madame Bouare Lalla Sidibe, chargée du programme PEV dans le district sanitaire de Markala. « Depuis que nous avons introduit la deuxième dose, nous commençons à sentir une nette amélioration. En 2020 nous n’avons eu que 2 cas confirmés et il s’agissait d’enfants dont les parents sont très mobiles et donc pas à jour dans leur calendrier de vaccination. »

Au Mali, le taux de couverture vaccinale est passé de 39 % en 2013 à 87% en 2020 chez les enfants âgés de 12 à 23 mois. Ces résultats ont pu être atteints grâce à la mise en place de nouvelles et innovantes approches telles que :
- La création de registres numériques des enfants vaccinés,
- L’utilisation d’équipes de vaccination mobiles pour atteindre les populations vivant dans des zones difficiles à atteindre,
- L’utilisation des frigos solaires pour conserver les vaccins à une température optimale,
- La mise en place de sessions de vaccination dans des lieux de grand rassemblement (marchés, écoles, mosquées et principales gares routières) et,
- L’utilisation de la téléphonie mobile pour rappeler aux parents le calendrier de vaccination de leurs enfants.
Avec l’introduction du VAR 2 dans le PEV de routine, une initiative soutenue par GAVI Alliance et mise en œuvre par le Gouvernement du Mali avec l’appui de l’UNICEF, le nombre de cas de rougeole a connu une baisse dans le district de Markala, passant de 9 cas confirmés en 2019 à 2 cas en 2020. Un résultat atteint en grande partie grâce à l’engagement et la mobilisation d’agents vaccinateurs comme Youssouf, qui malgré un modeste revenu, sont plus que jamais déterminés pour la survie et le développement de chaque enfant dans leur communauté. « Vacciner les enfants de ma communauté, est un honneur pour moi, je suis encore plus fier quand je vois le parcours que nous avons mené durant des décennies pour que la vaccination soit acceptée dans nos communautés ».
La pandémie de COVID-19 révèle l’ampleur des défis à relever lorsque des communautés ne bénéficient pas du bouclier protecteur de la vaccination contre une maladie évitable par la vaccination. « Les vaccins, lorsqu’ils sont disponibles, sont l’outil le plus efficace pour prévenir la propagation des maladies à potentiel épidémique. C’est pourquoi il est plus important que jamais d’assurer la continuité de services essentiels et vitaux comme la vaccination, » affirme Docteur Abdoulaye BAGAYOKO, chargé de la vaccination pour les régions de Mopti et Ségou, lors d’une séance de vaccination dans un site de déplacés interne à Mopti.

La science est claire à ce sujet. Les vaccins sont sûrs, efficaces et capables de sauver des vies en prévenant la survenue des épidémies. Pour Oumar, le papa d’Aminata, cela ne fait l’ombre d’un doute : « Si ces vaccins n’existaient pas il aurait fallu en inventer. En plus de protéger nos enfants contre les maladies, ils sont gratuits. Nos parents, n’ont pas eu cette chance, alors profitons et vaccinons nos enfants, » conclut-il.