« Il ne faut pas que les gens se relâchent »
Madani Kane a été atteint de la Covid-19. Lui-même personnel de santé travaillant dans un hôpital du centre du Mali, il témoigne de sa prise en charge et de sa période de confinement à domicile.

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Sévaré – Madani Kane s’exprime doucement dans la cour de sa maison du quartier CAN de Sévaré où il est resté deux semaines en auto-isolation. Ce malade guéri de la Covid-19 a accepté de raconter sa prise en charge à Sévaré au centre du Mali. « Quand je suis rentré d’un séjour à Bamako, j’ai d’abord attrapé un rhume, puis, comme les signes évoquaient la maladie de la covid-19, j’ai fait un test » témoigne le pharmacien de 55 ans travaillant à l’hôpital Somine Dolo de Sévaré. « Je n’avais aucun doute sur l’existence de la maladie, je savais que c’était une réalité et qu’il peut y avoir des complications si on n’intervient pas tôt. »
Quand le résultat positif tombe, Madani demande à être pris en charge à domicile, plutôt qu’à l’hôpital. « Dans un premier temps ils étaient réticents mais quand je leur ai expliqué que ma famille était en visite à Bamako et que les conditions de confinement pouvaient être respectées, ils ont accepté que je reste à la maison. Un infirmier était chargé de passer tous les jours me voir pour prendre mes constantes. On m’a remis un thermo flash et une fiche sur laquelle je devais noter ma température, j’ai également reçu tous les médicaments nécessaires. »
« Le principal problème auquel les malades guéris de la Covid-19 sont confrontés c’est la stigmatisation. » - Dr. Abdoulaye Traoré
Le père de trois enfants a bénéficié d’une assistance de l’ONG COOPI, appuyée par l’UNICEF : « On m’a apporté des vivres, du riz, du lait, de l’huile, du tissu, une torche et j’en passe. Cela m’a fait plaisir » se souvient-il.
« Le principal problème auquel les malades guéris de la Covid-19 sont confrontés c’est la stigmatisation. »

Depuis le début de la pandémie en mars 2020, le Mali a enregistré 7839 cas de COVID-19 et 310 décès*. L’UNICEF Mali et ses partenaires accompagnent le gouvernement dans sa réponse face à la pandémie et apportent un soutien direct aux malades de la Covid-19. « Pour la riposte contre la maladie de la covid-19 nous avons bénéficié d’un appui matériel et en renforcement des capacités du personnel » explique Abdoulaye Traoré, médecin anesthésiste réanimateur et président du comité de pilotage pour la lutte contre la Covid-19 à l’hôpital Somine Dolo. « Ainsi, les sept tentes de notre secteur Covid ont été fournies par l’UNICEF, des matelas pour les patients, tout comme les équipements de protection individuelle que nous portons, les combinaisons, les visières, les gants, les bottes, etc. »
Au total, 121 patients atteint de la Covid-19 ont été pris en charge à l’hôpital Somine Dolo*. « Le problème principal auquel les malades guéris de la Covid-19 sont confrontés c’est la stigmatisation dans la communauté » souligne Abdoulaye Traoré. « On a traité cette maladie de « maladie maudite » et les gens avaient tendance à bannir les malades » regrette le médecin.
Madani Kane, lui, considère ne pas avoir été trop touché par cette stigmatisation : « J’ai appelé ma famille pour leur dire que je venais d’attraper la Covid-19 et on m’a dit d’arrêter de le divulguer, d’en informer les gens. J’ai répondu que non, c’était une maladie comme les autres mais qu’il fallait prendre des dispositions pour que mes proches soient testés, c’est tout. »
Pour améliorer la compréhension de cette maladie par les communautés et limiter les effets de l’épidémie sur les populations, l’UNICEF a mené plusieurs campagnes de sensibilisation via les radios locales, au travers de campagnes d’affichage et d’interventions dans les lieux publics comme les marchés, gares routières, mosquées ainsi qu’en installant des stations de lavage des mains sur tout le territoire.

« L’adaptation de la population aux méthodes barrières n’est pas facile » explique docteur Abdoulaye Traoré. « Nous avons tenu des tables rondes dans les radios, sensibilisé au niveau des grins**, dans la cour de l’hôpital, ou à l’entrée où un poste tv passe en boucle des messages sur la Covid-19. Ce n’est pas du jour au lendemain que les gens changent de comportement, c’est une épreuve de longue haleine. Nous devons continuer à sensibiliser les uns et les autres pour qu’ils acceptent l’existence de cette maladie et se protègent. »
Grâce à l’appui de la Coopération Allemande (BMZ), l’UNICEF Mali met en oeuvre de nouvelles approches adaptées pour la continuité des soins essentiels et permettre aux enfants de toutes les communautés de bénéficier de leur droit à la survie et au développement malgré un contexte de pandémie. Ainsi, entre mars et octobre 2020, 20 508 accouchements par personnes qualifiées ont eu lieu dans la région de Mopti, soit près de 6% de plus qu’en 2019 sur la même période. De même, 22 023 enfants malnutris sévères ont été pris en charge, ce qui représente une augmentation de 8,5 % par rapport à la même période l’année précédente.
Madani Kane insiste sur l’importance de prendre la Covid-19 au sérieux et de s’y habituer. « Il faut que les gens continuent à observer les mesures barrières, qu’ils ne se relâchent pas. A Bamako j’ai vu que j’étais le seul à porter le masque mais il ne faut pas que les gens pensent que c’est fini » prévient-il.