En quête de sécurité et d'éducation à Camp-Perrin.
Fuyant la violence dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, des familles cherchent refuge auprès de leurs proches dans les différentes régions du pays.
- Disponible en:
- Français
- English
Camp-Perrin, Haïti, 17 septembre 2023 - D'une voix calme mais teintée d'effroi à l'idée de partager à nouveau son récit, Mérélus P., âgé de 15 ans, prend la parole. "Des criminels ont envahi notre quartier à Carrefour-Feuilles. Ils nous ont terrorisés et ont pris la vie de nombreuses personnes. J'ai été témoin de ces horreurs de mes propres yeux. Ces scènes de crime m'ont profondément bouleversé. Pour ma santé et ma sécurité, nous avons été contraints de quitter la zone."
La résurgence de la violence dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince a entrainé une nouvelle vague de déplacement au cours des dernières semaines. Des familles ont été séparées, et des enfants se sont retrouvés sans leurs parents. Certains d'entre eux, ayant de la famille dans d'autres départements, ont envisagé de les rejoindre.
Judith Remarais, une infirmière de 33 ans travaillant à l'hôpital Immaculée Conception des Cayes, a ouvert sa maison à quatre enfants et bientôt un cinquième. Bien qu'elle n'ait pas encore d'enfants biologiques, Judith ressent une profonde connexion avec ces enfants. En collaboration avec sa mère, qui est commerçante, elles travaillent dur pour leur offrir une vie aussi normale que possible.
"Ces enfants sont de ma famille. Pour arriver jusqu'à Camp-Perrin, nous avons emprunté de l'argent pour couvrir leurs frais de transport. Nous ne savons pas comment nous rembourserons cette dette, mais nous devions sauver leurs vies", raconte Judith.
La nouvelle rentrée scolaire, officiellement lancée le 11 septembre à Doudoune, dans le Grand'Anse, s'avère difficile dans la région métropolitaine mais aussi au sein des familles qui accueillent les enfants déplacés. Ces familles ne disposent pas de ressources financières suffisantes pour envoyer les enfants à l'école. "Parmi les quatre enfants venus de Carrefour-Feuilles, seuls deux sont déjà scolarisés. Nous n'avons pas encore les moyens d'acheter le matériel scolaire nécessaire aux deux autres. Souvent, ils accompagnent ma mère lorsqu'elle vend des articles dans la rue. Ce n'est vraiment pas facile pour eux", explique Judith avec tristesse.
Cette situation est tout aussi désespérante pour les enfants, dont l'espoir de réaliser leurs rêves s'amenuise de jour en jour.
"On m'a inscrit à l'école Mixte St John de Camp-Perrin. Faute de ressources financières et de matériel scolaire, je n'ai pas encore eu la chance d'y aller. Cela me fait mal. Pour l'instant, mon seul souhait est de retourner à l'école", déclare timidement Emmanuela.
L'UNICEF, avec le soutien du Canada, a lancé un projet de transfert monétaire dans le Sud d'Haïti pour permettre aux parents vulnérables d'avoir les moyens nécessaires pour envoyer leurs enfants à l'école.
"Malgré nos problèmes financiers, je suis déterminée à envoyer tous les enfants à l'école, car c'est là qu'ils acquièrent les compétences nécessaires pour réussir dans la vie", conclut Judith.
Le mouvement massif de familles quittant Port-au-Prince pour chercher refuge dans d'autres départements aggrave la situation humanitaire préexistante dans le pays. Haïti compte aujourd’hui plus de 200.000 déplacés internes, dont 130.000 sont concentrés à Port-au-Prince. Il est impératif de ne pas abandonner ces enfants et leurs familles, qui ont également besoin d'aide pour faire face aux défis de la vie.
L'UNICEF a besoin de mobiliser près de 246 millions de dollars américains afin de fournir une assistance aux enfants et aux familles affectés par les urgences humanitaires. A ce jour, moins de 20 pour cent de ces ressources ont été mobilisées.