L'aide à son point le plus bas depuis 20 ans
Les pays riches ont encore coupé dans l'aide au développement,
la ramenant à 0,3 % de leurs PNB combinés -- son plus
bas niveau depuis 20 ans.
L'espoir de toucher les dividendes de la paix pour le développement
a été déçu. Les budgets militaires mondiaux
ont diminué d'un quart depuis la fin de la guerre froide, ce qui
représente une économie de plus de 250 milliards de dollars
par an; l'aide n'a pourtant augmenté que d'un milliard par an en
termes réels.
Les pays d'Europe du Nord -- Norvège, Danemark, Suède
et Pays-Bas -- continuent de verser au titre de l'aide une proportion
de leur PNB nettement plus élevée que celle des autres nations
industrialisées, d'après le rapport de 1996 de l'Organisation
de coopération et de développement économiques (OCDE).
La Norvège, qui donne actuellement 1,05 % de son PNB, vient en tête
du classement pour 1994, dernière année pour laquelle des
chiffres sont disponibles.
En bas du tableau, les Etats-Unis accentuent leur retard par rapport aux autres pays riches,
avec à peine 0,15 % de leur PNB -- dont 18 % destinés à l'Egypte et Israël.
Photo (ci-dessus): Seuls 10 % de l'aide vont à
des besoins essentiels et évidents comme l'eau potable et l'assainissement,
les soins de santé primaires et l'éducation de base.
©
En termes absolus, le Japon est le premier donateur, avec 13,2 milliards
de dollars en 1994, puis viennent les Etats-Unis avec 9,9 milliards. En
1994, près des deux tiers du montant total de l'aide, soit 59,1 milliards
de dollars, provenaient de quatre pays -- le Japon, les Etats-Unis,
la France et l'Allemagne.
L'aide publique se chiffre à 73 dollars par an et par habitant du
monde industrialisé. Les Danois sont les plus généreux,
avec 278 dollars par personne et par an. Par personne, les Canadiens donnent
deux fois plus que les Américains, les Japonais le double des Britanniques,
les Néerlandais deux fois plus que les Allemands.
Objectifs
En 1994, seuls quatre pays -- la Norvège, le Danemark, la Suède
et les Pays-Bas -- avaient atteint l'objectif de 0,7 % fixé pour
l'assistance.
L'objectif de consacrer à l'aide 1 % du PNB a été adopté
pour la première fois dans les années 50 par le Parti travailliste
britannique et approuvé par la suite par le Conseil cuménique
des églises (1958) et l'Assemblée générale des
Nations Unies (1960). A l'époque, le gouvernement des Etats-Unis
avait soutenu l'idée, puisqu'il finançait les deux tiers environ
de l'aide totale accordée aux pays en développement et considérait
cette mesure comme un moyen de partager la charge.
L'objectif de 1 % incluait toutes les ressources financières acheminées
vers les pays en développement, y compris les investissements privés.
Le Comité d'aide au développement (composé initialement
de neuf pays donateurs, contre 21 aujourd'hui) a introduit en 1969 l'idée
de l'aide publique au développement ou APD. Pour être comptabilisée
dans l'APD, l'aide doit être apportée par les gouvernements,
servir des fins de développement (à l'exclusion de l'aide
militaire) et être accordée sous forme de dons plutôt
que de prêts commerciaux.
Photo (ci-dessous): L'aide d'urgence est passée de
deux milliards de dollars en 1989 à cinq milliards en 1993. ©
Après cette nouvelle définition de l'aide, un nouvel objectif
de 0,7 % du PNB (demandé par la Commission Pearson en 1969) a été
accepté par tous les membres du Comité d'aide au développement
et entériné par l'Assemblée générale.
Au milieu des années 60, l'APD était d'à peu près
0,5 % des PNB des pays riches. Mais, loin de s'élever progressivement
jusqu'au niveau souhaité, elle a diminué régulièrement
pour atteindre à peu près 0,29 % en 1973; elle a ensuite remonté
légèrement à la fin des années 70 et pendant
les années 80, pour reculer à nouveau dans les années
90 jusqu'à son taux actuel de 0,3 %.
Directions
L'augmentation des flux privés a aidé à compenser la
diminution de l'aide gouvernementale, mais la plupart des capitaux commerciaux
sont placés dans les économies déjà dynamiques
d'Asie du Sud-Est. Ainsi, sur les 45 milliards de dollars investis directement
depuis l'étranger dans les pays en développement en 1994,
seuls deux milliards de dollars sont revenus à l'Afrique.
A première vue, il semble que cette carence puisse être compensée
par le relèvement progressif à 30 % de l'aide publique allouée
à l'Afrique subsaharienne. Mais une part importante
de cette assistance a été accordée sous forme d'allégement
et de rééchelonnement de la dette. Ces mesures permettent
de maintenir l'aide à des niveaux plus élevés que cela
ne serait le cas autrement, sans frais supplémentaires. Mais elles
ne mobilisent pas de nouvelles ressources pour le développement.
L'allégement de la dette représente maintenant de 10 à
20 % de l'aide, ce qui signifie qu'une proportion significative de l'APD
ne quitte jamais les livres de comptes des départements financiers
dans les pays donateurs. Au Portugal, par exemple, en 1993, près
des deux tiers de l'aide ont été octroyés sous forme
d'allégement de la dette. En Italie, la proportion était presque
d'un tiers.
Dans les années 90, les budgets de l'aide ont également été
sollicités par les nouveaux pays en situation de besoin qui sont
nés de l'effondrement de l'Union soviétique. Bien qu'elle
ne soit pas comptabilisée au titre de l'APD, l'assistance aux pays
de l'ancien bloc soviétique (parfois appelés «pays en
transition») a atteint 7,5 milliards en 1994 -- soit presque 13
% de l'aide octroyée au monde en développement. (Les républiques
d'Asie centrale bénéficient maintenant de l'aide publique.)
L'aide pour le développement à long terme est aussi menacée
par le coût croissant des situations d'urgence. L'assistance humanitaire
en cas de catastrophe est passée de moins de deux milliards de dollars
en 1989 à cinq milliards de dollars en 1993.
La seule facette positive dans un tableau autrement bien sombre est l'accroissement
de l'aide versée par les ONG. Bien que les estimations varient, le
montant total de l'assistance qu'elles fournissent s'élève
actuellement à quelque six milliards de dollars par an, soit environ
10 % de l'aide fournie par les gouvernements (bien que la comptabilisation
soit compliquée par le fait que, dans certains pays, une part non
négligeable de l'aide gouvernementale est canalisée par le
biais des ONG).
Priorité aux
besoins essentiels
Il est plus difficile de mesurer la qualité de l'aide que sa quantité,
mais ces dernières années, les donateurs ont fait l'objet
de pressions accrues leur enjoignant de révéler quel pourcentage
de l'aide est alloué aux besoins essentiels -- nutrition adéquate,
eau potable et assainissement sûr, soins de santé de base,
enseignement primaire et planification familiale.
Actuellement, à peine 10 % de l'APD reviennent à ces besoins.
Cinq institutions des Nations Unies -- le FNUAP, l'OMS, le PNUD, l'UNESCO
et l'UNICEF -- ont demandé que la proportion passe à 20
% au moins. Mais pour la plupart des ONG des pays riches, ce chiffre est
trop faible. Novib, une ONG néerlandaise, préconise par exemple
que la moitié de l'aide totale serve directement à améliorer
les revenus des pauvres.
| Montants |
Evolution |
| Aide totale (milliards de $) | Aide par habitant (%) | |
APD en % du PNB | Evolution (en % du PNB) |
| 1994 | 1994 | | 1973-74 | 1993-94 |
Japon | 1,2 | 106 | Danemark | 0,50 | 1,03 | 0,53 |
Etats-Unis | 9,9 | 38 | Norvège | 0,52 | 1,03 | 0,51 |
France | 8,5 | 146 | Suède | 0,62 | 0,97 | 0,35 |
Allemagne | 6,8 | 84 | Pays-Bas | 0,57 | 0,79 | 0,22 |
Royaume-Uni | 3,2 |
55 | Finlande | 0,16 | 0,37 | 0,21 |
Italie | 2,7 | 47 | France | 0,43 | 0,63 | 0,20 |
Pays-Bas | 2,5 | 163 | Suisse | 0,15 | 0,35 | 0,20 |
Canada | 2,3 | 77 | Italie | 0,13 | 0,29 | 0,16 |
Suède | 1,8 | 209 | Autriche | 0,17 | 0,32 | 0,15 |
Danemark | 1,4 | 278 | Irlande | 0,09 | 0,23 | 0,14 |
Espagne | 1,3 | 33 | Japon | 0,25 | 0,28 | 0,03 |
Australie | 1,1 | 61 | Allemagne | 0,35 | 0,35 | 0,00 |
Norvège | 1,1 | 264 | Canada | 0,45 | 0,44 | -0,01 |
Suisse | 1,0 | 138 | Nlle-Zélande |
0,27 | 0,24 | -0,03 |
Autriche | 0,7 | 83 | Royaume-Uni | 0,38 | 0,31 | -0,07 |
Belgique | 0,7 | 72 | Etats-Unis | 0,23 | 0,15 | -0,08 |
Finlande | 0,3 | 57 | Australie | 0,51 | 0,35 | -0,16 |
Portugal | 0,3 | 31 | Belgique | 0,51 | 0,35 | -0,16 |
Irlande |
0.1 | 31 | Luxembourg | - | 0,38 | - |
Luxembourg | 0,1 | 147 | Portugal | - | 0,32 | - |
Nlle-Zélande | 0,1 | 31 | Espagne | - | 0,28 | - |
Total | 59,1 | Moyenne 73 | Total | 0,30 | 0,30 | 0,00 |
Note: Le total des pourcentages n'est pas exactement de 100 parce que les chiffres ont été arrondis.
SOURCE: OCDE, Coopération pour le développement 1995, 1996.
Aide aux pays en transition*
(non comptée comme APD)
| Millions de $ | Par rapport à l'APD (%) |
Australie | 4 | 0.4 |
Nlle-Zélande | 1 | 1 |
Japon | 247 | 2 |
Canada | 73 | 3 |
Danemark | 37 | 3 |
Norvège | 45 | 4 |
Pays-Bas | 118 | 5 |
Suède | 91 | 5 |
Italie | 196 | 7 |
France | 650 | 8 |
Portugal | 28 | 9 |
Royaume-Uni | 293 | 9 |
Belgique | 79 | 11 |
Suisse | 107 | 11 |
Luxembourg | 7 | 12 |
Espagne | 157 | 12 |
Irlande | 16 | 15 |
Finlande | 51 | 18 |
Etats-Unis | 2422 | 24 |
Allemagne | 2613 | 38 |
Autriche | 261 | 40 |
Total | 7497 | 13 |
*Bélarus, Bulgarie, Estonie, Féd. de Russie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, R. de Moldva, R. tchèque, Roumanie, Slovaquie, Ukraine
SOURCE: OCDE, Coopération pour le développement 1995, 1996.
[Table des matières] - [Haut de la page] - [Page suivante]