Plus de 11 000 enfants tués ou blessés au Yémen
À la suite de sa visite dans le pays, Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF, appelle à l’instauration de toute urgence d’une nouvelle trêve

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NEW YORK, le 12 décembre 2022 – Plus de 11 000 enfants ont été tués ou mutilés dans le conflit qui déchire le Yémen, d’après l’UNICEF – soit quatre par jour en moyenne depuis l’intensification des affrontements en 2015. Il s’agit uniquement des chiffres vérifiés par l’Organisation des Nations Unies (ONU), et le véritable bilan de cette guerre est probablement beaucoup plus lourd. Si la trêve négociée par l’ONU a permis de réduire de manière significative l’intensité du conflit, 62 enfants ont été tués ou blessés entre la fin de la trêve, début octobre, et fin novembre, et au moins 74 enfants figurent parmi les 164 personnes tuées ou blessées par des mines terrestres et des munitions non explosées entre juillet et septembre 2022.
Près de huit ans après l’intensification du conflit, plus de 23,4 millions de personnes, dont 12,9 millions d’enfants, ont besoin d’une aide humanitaire et de protection, soit près des trois quarts de la population. Selon les estimations, 2,2 millions d’enfants yéménites souffrent de malnutrition aiguë, dont près de 540 000 enfants de moins de 5 ans en état de malnutrition aiguë sévère, qui luttent pour leur survie.
« Pour Yasin, âgé de 7 mois, et sa mère Saba, que j’ai rencontrés à l’hôpital d’Aden, et pour tous les autres enfants dans la même situation, il s’agit de lutter pour survivre au quotidien », raconte Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF, qui a lancé la semaine dernière l’appel à l’Action humanitaire pour les enfants depuis le Yémen. « Des milliers d’enfants sont morts, et la vie de centaines de milliers d’autres est menacée par des maladies évitables ou par la famine. Yasin n’est qu’un enfant parmi de nombreux autres souffrant de malnutrition sévère au Yémen. Tous ont besoin d’une aide immédiate, les services de base s’étant tout simplement effondrés. »
Plus de 17,8 millions de personnes, dont 9,2 millions d’enfants, n’ont pas accès aux services d’approvisionnement en eau, d’assainissement et d’hygiène (EAH). Depuis plusieurs années, le système de santé du pays est extrêmement fragile : seuls 50 % des établissements de santé sont opérationnels. Ainsi, 22 millions de personnes, dont environ 10 millions d’enfants, sont privés d’accès à des soins de santé adaptés.
À l’échelle nationale, la couverture vaccinale stagne : 28 % des enfants de moins d’un an n’ont pas reçu les vaccins de routine. Une situation qui, conjuguée au manque d’accès à de l’eau salubre, rend les enfants extrêmement vulnérables face aux épidémies régulières de choléra, de rougeole, de diphtérie et d’autres maladies évitables par la vaccination.
Parallèlement, le Yémen est confronté à une grave crise de l’éducation, qui aura des conséquences considérables à long terme pour les enfants. Deux millions d’entre eux sont déscolarisés, et le nombre d’enfants dont l’éducation est perturbée pourrait s’élever à six millions, puisqu’au moins une école sur quatre a été détruite ou partiellement endommagée dans le pays.
« Pour que les enfants du Yémen aient une chance de vivre un avenir digne, les parties belligérantes, la communauté internationale et tous les acteurs influents doivent veiller à ce qu’ils soient protégés et soutenus », affirme Catherine Russell. « Cela vaut notamment pour les enfants comme Mansour, que j’ai rencontré dans un centre de réadaptation et d’appareillage. Le jeune garçon a été amputé au niveau du genou après avoir été touché par une balle tirée par un sniper. Aucun enfant ne devrait avoir à vivre ça. L’instauration d’urgence d’une nouvelle trêve constituerait une première étape bénéfique, qui permettrait d’apporter une aide humanitaire essentielle. À terme, seule une paix durable permettra aux familles de reconstruire leurs vies brisées, et de commencer à bâtir des projets d’avenir. »
L’UNICEF a besoin de toute urgence de 484,4 millions de dollars des États-Unis pour agir en 2023 face à la crise humanitaire qui touche le Yémen. L’absence de financements prévisibles pour les interventions d’urgence met en péril la continuité de services essentiels, ce qui constitue une menace pour la vie et le bien-être des enfants.
Malgré les difficultés, en 2022, l’UNICEF a été en mesure de :
- Contribuer au traitement contre la malnutrition aiguë sévère de plus de 260 000 enfants dans 4 584 établissements de soins de santé primaire et 34 centres de nutrition thérapeutique ;
- Assurer des transferts monétaires d’urgence pour près de 1,5 million de foyers chaque trimestre, des fonds qui ont bénéficié à environ neuf millions de personnes ;
- Fournir un accès pérenne à de l’eau potable à 4,7 millions de personnes grâce à un large éventail d’activités, notamment l’acheminement d’eau par camions-citernes, l’installation de points de distribution d’eau, et l’élargissement des systèmes d’approvisionnement en eau dans les camps pour personnes déplacées à l’intérieur du pays. L’UNICEF a également fourni du carburant pour contribuer à la production et à la distribution d’eau salubre par 36 sociétés locales d’assainissement et de distribution d’eau dans 15 gouvernorats ;
- Fournir des vaccins contre la rougeole et la poliomyélite à au moins 1,6 million d’enfants ayant un accès restreint ou inexistant aux soins de santé primaire ;
- Fournir une aide psychosociale à plus de 254 000 enfants et personnes ayant la charge d’enfants dans des zones touchées par le conflit, et un enseignement vital sur les dangers liés aux mines à plus de 423 000 enfants et membres de communautés ;
- Faire bénéficier à plus de 1,6 million de personnes vivant dans des zones rurales reculées d’un accès aux services de soins de santé publics ;
- Apporter un appui aux services de santé maternelle, néonatale et infantile dans 24 hôpitaux en fournissant une aide opérationnelle ainsi que des équipements et du matériel. En outre, le soutien apporté à 4 500 centres et 288 équipes mobiles proposant des programmes thérapeutiques ambulatoires a permis de renforcer les services de traitement et de prévention de la malnutrition.
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Note aux rédactions :
Ces chiffres sont ceux que l’Organisation des Nations Unies a pu vérifier. Les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés. Entre mars 2015 et le 30 septembre 2022, on a dénombré :
- 11 019 enfants tués ou mutilés ;
- 3 774 enfants tués (2 742 garçons ; 983 filles ; 49 de genre inconnu) ;
- 7 245 enfants blessés (5 299 garçons ; 1 946 filles) ;
- 3 995 enfants participant au conflit (3 904 garçons recrutés pour les combats, et 91 filles participant aux événements ou présentes aux postes de contrôle) ;
- 672 attaques contre des établissements scolaires ou utilisations militaires de ceux-ci ;
- 228 attaques contre des établissements de santé ou utilisations militaires de ceux-ci ;
- 445 enfants détenus (tous des garçons) ;
- 152 enfants enlevés (140 garçons et 12 filles) ;
- 47 enfants exposés à des violences sexuelles liées au conflit (29 garçons et 18 filles).
À propos de l’UNICEF
L’UNICEF travaille dans certains des endroits les plus inhospitaliers du monde pour atteindre les enfants les plus défavorisés. Dans plus de 190 pays et territoires, nous travaillons pour chaque enfant, chaque jour, afin de construire un monde meilleur pour tous.