Le dilemme des écoles occupées par les familles déplacées
Plus de 2.000 écoles ont été contraintes de fermer depuis janvier 2022 en raison de l'insécurité et de l'accueil de personnes déplacées, privant ainsi des dizaines de milliers d'enfants de leur droit à l'éducation.
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« C'est lorsque nous avons entendu les tirs d'armes à feu et les bombes que nous avons fui notre village pour venir ici », raconte Béatrice Buregeya en se tenant dans la salle de classe qui lui sert de refuge à Minova, dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC). « J'ai pris les enfants et nous avons commencé à marcher », poursuit la mère de famille.
Lorsque les familles déplacées ont commencé à affluer à Minova, les autorités de la ville ont dû réfléchir rapidement. Certaines familles ont trouvé refuge dans la communauté, mais l'espace était limité. « C'est en avril que nous avons eu un afflux massif de familles déplacées et il a été convenu que les écoles serviront d'abri jusqu'à ce qu'une meilleure solution soit trouvée », explique Dunia Sukari, le directeur de l’école où Béatrice a trouvé refuge.
Les conditions d'enseignement à l'Ecole Primaire Umoja étaient déjà loin d'être idéales, avec 600 élèves inscrits pour seulement six salles de classe et enseignants. La présence des familles déplacées dans l'école a causé des perturbations dans l’enseignement l’année passée. « Les familles quittaient les salles de classe pour les cours pendant la journée, mais l'endroit devenait sale, et chaque fois qu'il pleuvait, tout le monde se réfugiait à l'intérieur et nous devions suspendre les cours », explique le directeur.
A quelques jours de la rentrée scolaire, Dunia Sukari se prépare à accueillir 137 enfants supplémentaires parmi les enfants déplacés installés à l’école. Des abris ont été construits dans la cour de l’école, ce qui permet aux familles de quitter les salles de classe avant le début de l'année scolaire. L'école est également en train d'être nettoyée, même s'il reste difficile de remettre complètement les salles de classe dans l'état où elles se trouvaient avant la crise.
Dans le village de Kitembo, la situation est similaire à l'école primaire locale. Les salles de classe n'ont pas été utilisées pour abriter les familles déplacées, mais des centaines de personnes déplacées se sont installées dans l’enceinte de l’école dans des abris de fortune construits avec des feuilles de bananier séséchées séchées et du bois. Environ 200 enfants déplacés seront inscrit dans cette école pour la nouvelle année scolaire, même si les besoins sont bien plus importants.
L'UNICEF plaide auprès des autorités pour que davantage de places soient disponibles pour les enfants déplacés. Un espace temporaire d'apprentissage avec bloc sanitaire a été installé à côté de l’école pour servir de salle de classe supplémentaire. Au total, plus de 420 espaces d'apprentissage temporaires ont été construits cette année par l'UNICEF et ses partenaires dans la province du Nord-Kivu afin d'offrir une éducation aux enfants déplacés.
Depuis le début de l'année, 1,6 million de personnes ont été déplacées à cause des violences dans l'est de la RDC. Plus de 2.000 écoles ont dû fermer en raison de l'insécurité et de l'accueil de personnes déplacées, privant ainsi des dizaines de milliers d'enfants de leur droit à l'éducation. Les enfants qui ne vont pas à l'école ne manquent pas seulement d'apprendre, mais sont aussi plus exposés aux risques d'abus, de travail et de mariage des enfants.
Béatrice, la mère de famille installée dans l’une des salles de classe de Minova, emballe ses affaires pour préparer son déménagement vers les abris afin que la salle de classe dans laquelle elle se trouve puisse être préparée pour la nouvelle année scolaire. « C'est bien d'être à l'abri ici, mais nous comprenons que l'école a besoin de ses salles de classe. J'espère que tous mes enfants pourront être inscrits dans cette école », conclut Béatrice.