Les adolescent.es développent leurs propres solutions pour lutter contre les grossesses précoces
Un phénomène qui touche de nombreuses adolescentes et compromet leur droit à une santé et une éducation de qualité

Raoudathe, Chantal, Anne-Marie, Triphène, Immaculée, Espérancia, Claudite sont avant tout des amies. Mais depuis plusieurs mois, elles forment un collectif d’innovatrices hors pair. Toutes élèves au CEG de Bohicon, situé dans le Zou, elles sont adolescentes et se sentent concernées par la problématique des grossesses précoces, un phénomène qui touche de nombreuses adolescentes et compromet leur droit à une santé et une éducation de qualité.
Entre 2016 et 2020, plus de 9.000 cas de grossesses ont été recensés dans les établissements scolaires publics et privés par le Ministère de l'Enseignement Secondaire, de la Formation Technique et Professionnelle. Le phénomène n’est pas nouveau mais reste un sujet tabou au sein de l’école comme dans les familles.
Par manque d’information, par peur du regard des autres, ou par manque de moyen, les adolescentes ont des connaissances limitées sur un sujet qui leur est pourtant très personnel : leur santé sexuelle et reproductive. Celles qui tombent enceintes peuvent être rejetées par leur famille et leur proche et finissent par abandonner l’école. Sans diplôme ou formation, mais à présent fille-mère et devant subvenir aux besoins de leur enfant, nombreuses d’entre elles se retrouvent dans des situations de précarité, où leur vulnérabilité s’accroît.
Face à ces défis, Raoudathe et ses amies ont formé le groupe « IRELCA ». Après avoir reçu une formation soutenue par l’UNICEF avec l’appui d’UNICEF France, utilisant la méthode UPSHIFT d’innovation sociale, elles ont développé un jeu de Ludo qui permet aux adolescentes d’en apprendre plus sur la gestion de l’hygiène menstruelle.
Comme elles, plus de 100 adolescents et adolescentes de 13 à 19 ans ont été formés pour développer leurs propres solutions aux problèmes auxquelles ils font face. Jeux, séries télévisées, podcasts, bandes dessinées, chansons, campagnes de sensibilisation … leur mantra pourrait être « pour chaque défi, une solution ».
Regorgeant de créativité et d’envie de changement, ils ont reçu des formations sur l’innovation sociale, le leadership, et la gestion de projets en étant accompagné de coachs et d’experts sur la thématique de la santé sexuelle et reproductive afin de pouvoir définir, repenser et mettre en œuvre leur projet.
« L'outil UPSHIFT a d’abord attiré mon attention car je suis paire éducatrice dans mon collège », explique Merveille, membre de l’équipe des « Chiwawas » qui ont écrit, produit et réalisé une série télévisée de 3 épisodes sur le parcours d’une collégienne qui tombe enceinte et se retrouve dans une situation de grande vulnérabilité par manque d’information fiable et se retrouve stigmatisée.
« C’est une approche très utile pour nous, adolescentes, car elle a fait de nous des actrices de changement. Nous avons pu améliorer nos connaissances sur la problématique de la santé sexuelle et de reproduction tout en nous permettant de devenir meilleures en tant que personnes. On a appris que nous sommes capables, devant les difficultés de la vie, de réfléchir pour trouver des solutions innovantes » explique-t-elle.
En novembre 2022, les 16 équipes d’adolescents formés sur la méthodologie UPSHIFT ont pris part à une compétition pour présenter leurs projets à un jury, composé de membres de l’UNICEF mais aussi de personnel du Ministère de la Santé. De Zogbodomey, à Zakpota et Bohicon, ils ont expliqué la genèse de leurs solutions mais également les partenaires et perspectives envisagées afin que leurs projets puissent être mis à l'échelle pour bénéficier au maximum d’adolescent.es au Bénin.
À Bohicon, c’est l’équipe des « Lions » qui a remporté le concours, à travers une chanson et un clip vidéo réalisé sur la problématique du mariage des enfants et ses conséquences. Reprise en cœur par tous les participants, elle sonne déjà comme un hymne à cette problématique qui touche une fille sur trois au Bénin.
« Notre objectif est avant tout d’assurer un accès à des soins de santé de qualité pour les adolescents, et les adolescentes en particulier. Nous savons qu’elles ont un accès plus limité à l’information et que certains sujets qui les affectent directement restent tabou. En outillant les adolescentes avec des outils comme UPSHIFT, nous voyons qu’elles sont en capacité de non seulement améliorer leur santé mais aussi de prendre des initiatives pour favoriser le dialogue parent-enfant et entre jeunes. Le fait que ces 100 adolescents aient pu s’informer et développer leurs compétences tout en proposant des solutions tangibles à leurs problèmes est déjà un grand succès pour nous » a expliqué Maryam Sylla, Cheffe de la survie et de l’épanouissement de l’enfant à UNICEF Bénin.
Avec le soutien d’UNICEF France, l’UNICEF soutient l’autonomisation des jeunes et des adolescent.es afin de leur donner les compétences nécessaires pour atteindre leur plein potentiel et faire entendre leurs voix, pour faire respecter leurs droits.