En plein siège de Madaya, des signes d’amélioration

En plein siège de Madaya, des signes d’amélioration

Par Shushan Mebrahtu
UNICEF Syrian Arab Republic/2016
27 mai 2018

Après l’arrivée à Madaya de plusieurs convois d’aide humanitaire, les habitants de la ville assiégée présentent aujourd’hui quelques signes d’amélioration. Mais à cause de la limitation d’accès, l’hôpital improvisé se trouve sans personnel médical professionnel et sans fournitures alors des centaines de personnes ont toujours un besoin urgent de soins médicaux.
  

MADAYA, République arabe syrienne, 10 mai 2016 – Madaya, la ville de Syrie qui a autrefois été la source de photos bouleversantes d’enfants malnutris, présente aujourd’hui des signes d’amélioration. Grâce à l’appui de l’UNICEF et à la détermination du personnel de santé, la situation causée à Madaya par la malnutrition est en train de s’améliorer lentement.

UNICEF Syrian Arab Republic/2016

Mohammed assis en compagnie de la Représentante de l’UNICEF en Syrie en janvier 2016. Juste quelques mois auparavant, il souffrait de malnutrition grave et était extrêmement faible et fragile.

Mais les restrictions imposées par le siège continuent à interdire l’accès du personnel médical et les évacuations sanitaires des enfants ayant besoin de soins spécialisés. Pour ceux qui ont un besoin urgent de soins médicaux – environ 1300 personnes dont 92 enfants et leurs familles – la situation reste désespérée.

La toute dernière arrivée d’un convoi humanitaire inter-agences pour Madaya s’est déroulée le 30 avril 2016 et l’équipe de l’UNICEF a effectué une visite dans l’unique hôpital improvisé, à l’intérieur de la ville. Mal équipé et sous-qualifié pour soigner le volume élevé de patients, le personnel a demandé l’évacuation sanitaire immédiate des personnes se trouvant dans un état critique. Il a également fait part de ses craintes de manquer rapidement de produits nutritionnels en raison des possibilités d’accès extrêmement limitées pour l’aide humanitaire.   

« Chaque jour nous sommes les témoins du décès de personnes qui sont sur la liste des évacuations sanitaires. Les patients meurent. Que pouvons-nous faire ? »
  

Plus forts

Alors qu’il effectuait une visite à l’hôpital, le personnel de l’UNICEF a assuré des soins de suivi pour environ quarante enfants qui, lors de la dernière mission dans la ville le 17 février, présentaient des symptômes graves de malnutrition.

« Par rapport aux niveaux terribles de malnutrition que nous avons observés en janvier et en février, la situation à Madaya s’est stabilisée », a dit le Dr Rajia Sharhan, chargée de la nutrition à l’UNICEF et qui,  aux côtés de son collègue le Dr Houssam Baradee, spécialiste en nutrition, participait à la mission.

« Lors des deux dernières missions nous avons trouvé des gens qui survivaient à peine. Malheureusement, lors de notre visite en janvier, nous avons aussi assisté à la mort d’un garçon de seize ans qui était atteint de malnutrition aiguë associée à des complications médicales. Il était trop tard pour lui sauver la vie. La scène était déchirante », a ajouté le Dr Sharhan. « À présent, les enfants sourient, ils paraissent en meilleure santé et animés. À l’hôpital, les consultations sont devenues plus organisées. »

UNICEF Syrian Arab Republic/2016

Un membre du personnel de l’UNICEF tient Limar sur ses genoux. Limar était atteinte de malnutrition et était au bord de la mort quand on l’a amenée à l’hôpital improvisé de Madaya, en janvier. Elle est actuellement en convalescence et sera capable de mener une vie en bonne santé

Mohammed, 8 ans, est l’un des enfants qui poursuit sa convalescence. Il y a seulement quelques mois, il avait figuré sur une vidéo qui avait été vue partout sur Internet et avait attiré l’attention du monde entier sur la malnutrition sévère à Madaya. Quand l’équipe de l’UNICEF l’avait rencontré en janvier,  Mohammed était extrêmement faible et fragile, avec, sur son petit corps, la cage thoracique saillante.  La vie de Mohammed a pu être sauvée grâce à l’équipe médicale de Madaya qui l’a traité avec des aliments thérapeutiques de l’UNICEF.  Mohammed est aujourd’hui plus fort et est retourné à l’école. Il affirme avec fierté vouloir devenir médecin.

Limar, le bébé aux yeux énormes et obsédants qui figurait sur une vidéo qui a également été vue partout sur Internet, était à deux doigts de la mort quand il a été amené en janvier à l’hôpital improvisé. La fillette était atteinte de malnutrition aiguë et avait complètement perdu l’appétit, son corps affaibli étant incapable d’obtenir les nutriments essentiels à partir de la nourriture qu’elle recevait. Son état était si critique qu’elle pouvait soit mourir soit risquer de subir des dommages mentaux et physiques permanents. Heureusement, Limar a reçu juste à temps le traitement qui lui était indispensable et est à présent sur pied et en train de se rétablir. Elle sera capable de mener une vie en bonne santé mais elle doit recevoir des soins médicaux spécialisés en permanence.
  

Les effets dévastateurs du siege

Malgré les améliorations concernant la nutrition des enfants, la situation humanitaire de la ville dans son ensemble est toujours désespérée. Les enfants continuent à souffrir des effets dévastateurs des restrictions imposées par le siège. Ehda, 8 ans, a subi en février une blessure à l’œil droit provoquée par un éclat d’obus. Elle n’a pas pu quitter Madaya pour se faire soigner de la perte de vision dans l’œil. 

Les autres enfants sont exposés à des états dangereux pour leur vie comme ceux provoquées par l’insuffisance rénale, les rhumatismes articulaires aigus, les éclats d’obus ou les maladies du cœur et du foie, des états qui exigent un traitement spécialisé qui n’est actuellement pas disponible à l’hôpital improvisé. L’équipe de l’UNICEF a identifié quatre-vingt douze enfants ayant besoin d’une évacuation sanitaire d’urgence.   

Un jeune médecin qui n’a pas achevé ses études, un dentiste et un vétérinaire sont les trois seuls professionnels de la santé à Madaya. Ils font ce qu’ils peuvent pour sauver les vies mais ils exercent dans des conditions extrêmes, confrontés à des queues de patients à traiter avec des fournitures et du matériel médical insuffisants.  « Nous avons dû apprendre à soigner les patients sur le tas, nous sommes devenus des spécialistes tout en étant toujours des étudiants », a dit le personnel médical au personnel de l’UNICEF. 

Alors que depuis les trois derniers mois les vivres et les produits pour la nutrition arrivent par l’intermédiaire de convois humanitaires, la population aurait recommencé à prendre trois repas par jour. À la différence des mois précédents, les gens ne se plaignent pas de la faim mais du manque de variété dans leur régime alimentaire. Quelques signes de vie réapparaissent à Madaya mais les étagères des magasins sont toujours vides.
  

Nécessité d’une évacuation d’urgence

Le personnel de l’hôpital a rapporté de nombreux cas de cancer du foie et de diverses maladies graves qui ne peuvent être traitées et dont sont morts un certain nombre de patients. L’inanition prolongée associée à l’apport soudain d’aliments ou du mauvais type d’aliments s’est elle-même soldée par des complications médicales qui exigent des soins spécialisés et constants.

Seulement 125 patients ont été évacués de Madaya lors de la dernière évacuation sanitaire, le 20 avril. Le personnel médical de l’hôpital, épuisé et dépassé par le nombre de personnes ayant besoin d’un traitement médical capable de leur sauver la vie, ne peut simplement pas faire face à la situation. Il prédit des retombées catastrophiques en ayant fait savoir à l’UNICEF qu’il ne dispose ni des moyens ni des connaissances de spécialistes ou du matériel et des médicaments nécessaires pour soigner les gens.  
 
Pour maintenir et poursuivre les améliorations dans le domaine de la nutrition et de la santé des enfants, l’UNICEF et les différentes agences humanitaires doivent disposer d’un accès sans conditions et permanent à Madaya et aux autres localités assiégées. Cet accès est nécessaire non seulement pour apporter l’aide qui est indispensable mais aussi pour pouvoir mener des évaluations, effectuer des traitements médicaux, appuyer l’évacuation des personnes se trouvant dans un état critique et rétablir les services de santé et de nutrition.