Au Kenya, une terrible sécheresse menace la sécurité alimentaire de 4 millions de personnes

Découvrez comment l’UNICEF aide les familles à lutter contre la malnutrition, la soif et la maladie.

Par Dan Oloo
Dabo Boru, 21 ans, accompagnée de Nuria, sa fille de deux ans, devant leur bétail mort gisant à quelques mètres de leur lieu d’habitation situé dans la région de Moyale, au Kenya.
UNICEF Kenya/2017/Oloo
31 mars 2017

MOYALE, Kenya, 31 mars 2017 – Une poussière suffocante flotte dans l’air, omniprésente, se dressant comme un écran à travers les chemins qui sillonnent le village de Badanrero au Kenya. Situé à une centaine de kilomètres de la ville de Moyale, à la frontière éthiopienne, l’endroit offre un spectacle de désolation avec pour seul paysage des terres plates et dévastées, parsemées d’arbustes séchés, à perte de vue.

Alors que la poussière se met à tourbillonner encore un peu plus fort dans l’air, enfants en bas âge et chèvres se précipitent à l’abri dans les minuscules huttes en bois et en chaume qui leur servent temporairement de maisons. La majorité des habitants vivant dans cette région aride du nord du Kenya sont des familles de pasteurs nomades.

Dabo Boru, 21 ans, mère de trois enfants, a quitté à pied son village natal d’Ambato avec sa famille pour rejoindre Badanrero, à 38 km. Ils se sont déplacés pour éviter que leur bétail ne meure de faim et de soif à cause de la sécheresse.

« J’ai fait venir toutes ces vaches ici dans l’espoir qu’elles survivent. J’ai même transporté du fourrage et de l’eau mais 18 d’entre elles sont déjà mortes, il ne nous en reste plus que trois », raconte Dabo en regardant tristement les cadavres en décomposition gisant à quelques mètres de sa hutte.

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Hiliki Diba, 27 ans, nourrit l’une de ses jumelles de neuf mois avec des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi.
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Hiliki Diba, 27 ans, nourrit l’une de ses jumelles de neuf mois avec des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi. Ce régime alimentaire lui a été prescrit par le dispensaire de Badanrero situé dans la région de Moyale, au Kenya, et soutenu par l’UNICEF.
Une lutte contre la faim, la soif et la maladie

Fin 2016, en raison d’un déficit de précipitations important, une terrible sécheresse s’est abattue sur les régions arides et semi-arides du Kenya, frappant 2,7 millions de personnes. Le comté de Marsabit, où se situe Moyale, compte parmi les régions les plus durement touchées. Des milliers d’enfants vivent dans l’insécurité alimentaire et doivent bénéficier de toute urgence d’un traitement contre la malnutrition sévère. 

« La faim est le principal problème ici, les enfants n’ont pas de lait et nous n’avons ni eau, ni nourriture. Nous sommes obligés d’aller chercher de l’eau très loin d’ici, et elle n’est même pas propre », poursuit Dabo. « Nous souffrons vraiment à cause de cette sécheresse. »

La plupart des sources d’eau naturelles de Moyale ont séché, une situation qui exerce une énorme pression sur les quelques puits de forage existants et bassins de retenue dont l’eau diminue comme peau de chagrin. Les familles comme celle de Dabo doivent marcher entre 10 et 15 km pour trouver de l’eau.

« Mon mari a quitté la maison depuis deux semaines maintenant, pour tenter de trouver des pâturages pour le reste de notre bétail. Je suis toute seule pour protéger et nourrir mes enfants, ce qui est très difficile sans animaux pour nous fournir du lait », ajoute la jeune femme.

Les habitants de la région font face à un risque élevé de maladie en raison de la malnutrition et de l’absence de systèmes d’assainissement adéquats. Hiliki Diba, 27 ans, a amené ses jumelles de 9 mois au dispensaire de proximité de Badanrero car elles souffrent de malnutrition et de diarrhée aqueuse aiguë.

« On m’avait expliqué comment allaiter exclusivement mes enfants jusqu’à l’âge de 6 mois, mais en nourrir deux en même temps, qui plus est pendant une sécheresse, s’est révélé extrêmement difficile pour moi. Je ne produis pas assez de lait parce que je ne mange pas assez, car il n’y a rien à manger. Je suis très faible et je tombe souvent malade », explique Hiliki.

Un enfant bénéficie d’un sachet d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi
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Un enfant bénéficie d’un sachet d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi. Composé de beurre de cacahuètes, de lait en poudre et d’une association de vitamines et de minéraux, ce mélange nutritif vise à traiter les enfants souffrant de malnutrition.
La réponse de l’UNICEF

« Pas moins de 100 000 enfants de moins de 5 ans vont avoir besoin d’être traités contre la malnutrition sévère à cause de cette sécheresse », explique Werner Schultink, représentant de l’UNICEF au Kenya. Plus de 180 000 enfants sont déscolarisés car il n’y a plus d’eau ni de cantine à l’école. « Imaginez les conséquences de cette situation, si elle persiste, sur leurs vies futures et celle de leur communauté », ajoute-t-il.

« L’UNICEF a tout mis en œuvre pour traiter ces enfants », poursuit le représentant. « Nous collaborons également avec les autorités locales pour réparer les puits de forage cassés afin d’améliorer l’accès à l’eau salubre. »

En ce qui concerne Hiliki, la malnutrition a été diagnostiquée chez ses deux jumelles qui ont été admises dans un programme nutritionnel thérapeutique en ambulatoire. Les fillettes ont été traitées au dispensaire de proximité soutenu par l’UNICEF grâce à des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi, des sachets à base de beurre de cacahuètes, de nutriments et de minéraux essentiels et enrichis en vitamine A.

Elles ont aussi été traitées contre la diarrhée et on a donné à Hiliki du savon, une bassine et des comprimés pour purifier l’eau une fois de retour chez elle. Les mères qui viennent à la clinique apprennent les règles de base en matière de nutrition et d’hygiène à appliquer chez elles afin de préserver leur santé et celle de leurs enfants pendant la sécheresse. 

« Les prévisions météorologiques des prochains mois ne sont pas prometteuses et laissent à craindre que la sécheresse ne va qu’empirer », déclare Stephen O’Brien, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence.

« Nous avons besoin de l’aide de toute la communauté internationale pour nous aider ici, sur le terrain. Il nous faut du renfort pour continuer à sauver des vies et à protéger des civils touchés malgré eux par cette terrible sécheresse. »

Si rien n’est fait, le nombre de personnes vivant dans l’insécurité alimentaire s’élèvera à 4 millions de personnes en avril 2017, d’après le gouvernement kenyan qui a lancé un appel à l’aide humanitaire.

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