Aider les enfants à faire face à la violence au Yémen

Aider les enfants à faire face à la violence au Yémen

Par Bismarck Swangin
Des enfants crient à l’unisson lors du rassemblement général du matin à l’établissement scolaire d’Al-Fadheela à Sanaa.
UNICEF Yemen/2015
25 mai 2018

Le conflit en cours au Yémen a de profondes répercussions sur la vie des enfants. Dans les écoles, les élèves apprennent à se servir du théâtre, du sport et du soutien par les pairs pour faire face à la guerre et aux violences qui les entourent.
  

SANAA, Yémen, le 14 avril 2016 – « Boum ! Boum ! » crie une fille, avant de se jeter au sol en même temps que quatre autres enfants. Quelques minutes plus tard, l’une d’entre elles se met à hurler. Les autres se relèvent et essaient de la calmer. « Tu vas bien, tu n’as rien, » dit l’une des filles, en rassurant sa camarade.

C’est le matin à Sanaa, la capitale du Yémen. Mes collègues et moi sommes arrivés juste à temps pour rejoindre les élèves de l’établissement scolaire d’Al-Fadheela pour leur rassemblement général, où les filles jouent une scène à l’image de leur réalité actuelle. Si dans ce contexte les élèves sont enthousiastes, la situation réelle, elle, est dangereuse, en particulier pour les enfants. 

>> Lire le rapport de l'UNICEF : Children on the Brink (en anglais)

Des enfants jouent au volleyball pendant leur cours de sport.
UNICEF Yemen/2015

Des enfants jouent au volleyball pendant leur cours de sport. Les activités comme le théâtre et l’éducation physique peuvent les aider à oublier temporairement la guerre et à se concentrer sur l’apprentissage

« C’est une manière de faire face pour les enfants, » explique Mohammed Elfadili, le Directeur général de l’éducation à Sanaa. « Ils rient et applaudissent en regardant les scènes jouées. Ce genre d’activités ainsi que le sport leur permettent d’oublier temporairement la guerre et de se concentrer sur l’apprentissage. »

En entrant dans le bureau du directeur, M. Elfadili me tape sur l’épaule. Je me retourne. Il me montre, sur ma droite, des éclats de verre au sol.

« Il y en avait beaucoup quand je suis venu en novembre constater les dégâts, » explique-t-il.
  

Réparer les dégâts

Au cours de l’année passée, le Yémen a connu d’intensifs bombardements et combats au sol. Les infrastructures civiles dont les écoles ont été attaquées et des enfants ont été tués ou mutilés, pour certains sur le chemin de l’école.

L’intensification du conflit a également entraîné la fermeture de près de 3 600 écoles et a interrompu la scolarité de 1,8 million d’enfants. Malgré quelques améliorations, plus de 1 600 écoles sont encore fermées à cause des dégâts ou pour des questions d’insécurité, privant environ 387 000 enfants d’éducation.

>> Lire le rapport de l'UNICEF: Éducation sous le feu

Comme plus de 1 000 autres écoles dans le pays, l’école d’Al-Fadheela a été endommagée, mais de manière indirecte. D’après les résidents, les bombardements intensifs sur une colline voisine ont engendré des vibrations, qui ont fait exploser certaines fenêtres. Avec l’appui de l’UNICEF, l’école a pu remplacer et nettoyer les carreaux cassés, de manière à ce que les enfants puissent retourner apprendre à l’école.

L’UNICEF appuie également la réhabilitation d’autres écoles dans le pays, et assure la formation des enseignants et des élèves pour aider les enfants à faire face à l’horreur du conflit. Les enseignants apprennent à être davantage conscients des émotions des enfants pour les aider à apprendre, et les élèves apprennent le soutien par les pairs, par exemple en jouant des scènes comme celle du rassemblement d’aujourd’hui, qui leur a redonné le sourire.
  

Des rêves face au désespoir

Après le rassemblement du matin, les élèves vont en classe. Ensuite, c’est l’heure du sport. Ils font des jeux, et plusieurs autres activités physiques, comme du volleyball, du cerceau et de la corde à sauter.

Tout a l’air normal – mais c’est loin d’être le cas.

Ghadeer, 13 ans, en neuvième année d’études, explique qu’il est difficile de se concentrer en classe quand le bruit des bombes et des tirs résonne dehors.

« Parfois au milieu d’une leçon, on entend un “boum”. On ne sait pas à quoi s’attendre. Certains crient, d’autres sortent de la classe en courant. »

Ghadeer veut être médecin. Et bien que ce conflit soit une menace pour son éducation, elle dit qu’il est aujourd’hui plus urgent que jamais qu’elle réalise ce rêve ambitieux.

« Je veux soigner toutes les personnes blessées ou malades. Chaque élève de l’établissement a un projet pour l’avenir et c’est pourquoi nous, qui sommes encore en vie, continuons de venir en cours, » explique-t-elle.

« Pour nous, même en plein désespoir, l’espoir d’un avenir meilleur reste intact. »